“Devenir écuyère du Cadre noir me semblait inaccessible”, Pauline Basquin

Ces derniers mois, Pauline Basquin a réalisé la meilleure performance française lors du Grand Prix Libre des championnats d’Europe de dressage de Riesenbeck avant d’en faire de même dans l’étape de la Coupe du monde de Lyon, où elle a même dépassé la barre symbolique des 80% avec son fidèle Sertorius de Rima*IFCE. Attachant beaucoup d’importance à la notion de travail d’équipe, qu’elle considère comme la clef de ses performances en compétition mais aussi de la réussite des galas du Cadre noir, la meilleure dresseuse française du moment se livre sur les valeurs véhiculées par sa tunique d’écuyère. Elle se confie également son parcours avec son fidèle Sertorius et les objectifs du dressage français pour Paris 2024.



Quel a été votre parcours jusqu’à devenir écuyère du Cadre noir de Saumur? 

Quand j’étais petite, je ne voulais pas forcément devenir écuyère du Cadre noir car cela me semblait ’inaccessible. Mes parents tenaient un poney-club en Bretagne, et je voulais le reprendre pour en faire, avant tout, un centre de formation. D’ailleurs, c’est pour passer mon instructorat que je suis arrivée à Saumur! Il se trouve qu’à l’époque, en 2006, il y avait un poste vacant dans la discipline du saut d’obstacles au Cadre… et je l’ai obtenu, donc je ne suis jamais repartie. Lorsque j’ai eu mes deux fils, j’ai demandé à ne plus sortir qu’en galas, car cela devenait compliqué pour moi de partir régulièrement en concours. Seulement, en arrivant au sein de l’écurie Prestige, l’entité dédiée aux galas, je me suis vu confier un cheval de dressage nommé Liaison*ENE HN (qui lui a permis d’être sacrée vice-championne de France Pro Élite en 2017, ndlr)… et je suis repartie en concours de dressage en 2012. Toutefois, cela était plus facile à conjuguer avec ma vie de mère car dans cette discipline, on sort moins fréquemment en concours qu’en saut d’obstacles.

Que représente pour vous la tunique du Cadre et le fait de la porter sur le circuit international de dressage?

Cette tunique véhicule des valeurs: le respect du cheval, la fluidité, l’harmonie au sein du couple ou encore la recherche de discrétion dans l’emploi des aides. Il s’agit des valeurs de l’équitation de tradition française (inscrite au patrimoine immatériel culturel de l’UNESCO depuis 2011, ndlr) et pour moi, c’est important d’en être une représentante, que ce soit en gala ou a fortiori en compétition. En bref, cette tunique a énormément de valeur à mes yeux.



“Lors des galas, il y a une recherche commune pour réaliser la meilleure prestation possible”

En quoi est-ce important pour vous de participer aux spectacles du Cadre noir? 

Quand j’ai intégré l’institution, j’étais cavalière de saut d’obstacles, mais c’étaient déjà les galas qui me faisaient rêver:  Avec l’instruction et la compétition, ces spectacles font partie des trois missions de tout écuyer, et c’est important. Ces trois activités sont intimement liées. Grâce aux galas, où l’on nous voit, et surtout en se montrant en compétition, nous avons des élèves. En retour, l’instruction nous nourrit: enseigner nous permet de nous remettre en question et d’améliorer notre propre technique. Les galas nous offrent l’opportunité de nous préparer pour la compétition alors que sortir en concours nous permet d’entraîner les chevaux pour les galas en “restant dans l’actualité”. Ainsi, nous ne devenons pas une académie figée: grâce à la compétition, nous évoluons. 

Outre une opportunité de vous préparer pour les compétitions, que vous apportent les galas?

J’adore les galas car ils nécessitent un véritable travail d’équipe. Lors de ces spectacles, il y a une recherche commune pour réaliser la meilleure prestation possible. En piste, nous formons une équipe harmonieuse où chaque écuyer a sa spécialité. Si les Sauteurs (les chevaux qui effectuent les sauts d’école, ndlr), sont traditionnellement réservés aux hommes, les filles présentent sans doute une équitation plus féminine comme dans notre Pas de trois. Les longues rênes académiques sont également présentées par des femmes, Laurence (Sautet) et Marie (Coumes). Aujourd’hui, les femmes apportent une image et une pratique différente de l’équitation française qui se fond dans les galas du Cadre noir.



“Nous avons atteint les 72% de moyenne d’équipe à Riesenbeck, et nous visons 73 voire 74% à Paris”

Pouvez-vous revenir sur votre progression avec Sertorius de Rima *IFCE, avec lequel vous avez réalisé la meilleure performance française dans le Grand Prix Libre des derniers championnats d’Europe à Riesenbeck?

Je monte Sertorius depuis ses trois ans, donc cela fait dix ans que nous sommes associés. Il est arrivé au Cadre noir ave l’objectif qu’il intègre un jour la reprise des sauteurs. Il n’était pas très grand et c’est pourquoi on me l’a confié au départ. L’idée était que je lui fasse faire ses débuts en attendant qu’il grandisse, avant qu’il ne soit attribué à un écuyer dont les sauteurs sont la spécialité. Finalement, il s’est avéré qu’il trottait bien, qu’il était doué pour le dressage, et voilà comment j’ai pu le garder alors qu’il n’était pas du tout destiné à cette discipline! Il s’est révélé de plus en plus talentueux et a disputé son premier concours à six ans. Ensuite, il a gagné le championnat de France des chevaux de sept ans, puis le championnat Pro 2 à huit ans. Il a ensuite connu deux années noires et été victime d’une grosse crise de coliques qui a nécessité deux interventions. Celles-ci l’ont tenu à l’écart des pistes de compétition pendant deux saisons. À son retour, à onze ans, il a été sacré champion de France Pro 1, puis Pro Élite en 2022, et ainsi de suite jusqu’aux championnats d’Europe (où le duo a contribué à la superbe sixième place de la France et conclut la Libre au treizième rang, ndlr). Je savais que ce cheval avait une belle marge de progression, et même si nous avons commis de grosses fautes durant les concours précédents, je les avais clairement identifiées et savais que je pouvais les rectifier avec l’aide de mon entourage. Atteindre un score de près de 80% (barre symbolique que le couple a ensuite dépassé lors de l’étape de la Coupe du monde de Lyon, dont il a terminé troisième, ndlr) lors de la Libre alors que c’était déjà inespéré que je me qualifie pour cette dernière épreuve était la récompense du travail d’une équipe.

Quels espoirs nourrissez-vous pour Paris 2024?

L’espoir, le projet du dressage français pour Paris 2024 est de pouvoir constituer une équipe solide et harmonieuse qui puisse tenir cette sixième place des Européens face à une concurrence plus forte encore, avec notamment les États-Unis. Nous avons atteint les 72% de moyenne d’équipe à Riesenbeck, et nous visons 73 voire 74% à Paris, non pas grâce au résultat d’une individualité qui tirerait le résultat de l’équipe vers le haut, mais avec chacun des cavaliers arrivant à atteindre ou dépasser ces 73%.



Bordeaux vous plonge “Au coeur du Grand Manège”

Le 1er février au soir, le public du Jumping international de Bordeaux aura justement l’occasion de vivre un gala du Cadre noir de Saumur. Menée par son écuyer en chef, le champion olympique 2016 de concours complet par équipe, le Colonel Thibaut Vallette, l’institution du Maine-et-Loire présentera un spectacle de 1h30 en dix-sept tableaux narrant l’histoire de cette académie équestre de renom: Au cœur du Grand Manège.

L'émotion, l’intimité et la connexion entre les écuyers et leurs chevaux sont au cœur de la mise en scène grâce notamment à un univers artistique très poétique. Au cœur du Grand Manège invite le spectateur à partager cette complicité et découvrir toute la passion et l’émotion de la belle équitation de tradition française, inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO, illustrée par les écuyers du Cadre noir et leurs chevaux. L’intention artistique utilise une narration mettant en scène un témoin intemporel, un fleuve: la Loire, qui s’invite avec élégance et poésie pour conter “son” Cadre noir, qu’elle a vu naître et grandir sur ses rives. Mis en scène pour ce gala, le savoir équestre séculaire de l’institution devient ainsi un formidable spectacle où tous les arts équestres – haute-école, bien sûr, mais également travail en liberté, aux longues rênes, saut d’obstacles ou les fameux et spectaculaires sauts d’école, en selle ou en main – sont mis en lumière sur un large répertoire musical allant des plus grandes œuvres classiques à des compositions originales spécialement créées. 

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