Henrik von Eckermann se rapproche d’un deuxième titre mais devra se méfier de Peder Fredricson et Julien Épaillard

Sur la route des Jeux olympiques de Paris 2024, Henrik von Eckermann s’est lancé le défi de soulever une deuxième fois consécutive la Coupe du monde Longines avec son génialissime King Edward, le meilleur cheval de ces dernières saisons. Le numéro un mondial semble idéalement lancé pour atteindre son objectif, mais devra tout de même regarder dans le rétroviseur, Peder Fredricson et Julien Épaillard (entre autres) étant à ses trousses.



Le deuxième acte de la finale de la Coupe du monde Longines de Riyad, une épreuve de type Grand Prix à barrage, s’est conclu par avec l’hymne suédois, comme le barème C d’hier. Pour cause, les hommes d’Henrik Ankarcrona semblent bien partis pour prouver que le drapeau bleu et jaune règne sans partage sur la planète jumping. Champions olympiques, du monde et d’Europe en titre, les Scandinaves ont aussi été au sommet l’an passé lors de la finale du circuit indoor, déjà grâce à Henrik von Eckermann et King Edward Ress, à Omaha. À nouveau impériaux ce soir, ceux-ci semblent bien partis pour entrer dans l’histoire du circuit et intégrer le cercle des double vainqueurs de ce rendez-vous. 

Le parcours initial de l’Allemand Frank Rothenberger a été une formalité pour le petit mais bondissant alezan de quatorze ans, dont l’agilité a suffi à éviter des fautes sur quelques barres frôlées d’un peu près. Dans le barrage à sept, lui et son longiligne partenaire ont eu un boulevard pour l’emporter, déroulant pour franchir les cellules en 43“38, malgré un sursis sur l’avant-dernier oxer étroit. “C’est extraordinaire ; j’ai connu deux très bons parcours. Bien sûr, il y avait un peu de nervosité mais mon cheval a été incroyable. Je voulais être en tête avant samedi, mission accomplie. J’aime la pression, ça ne me fait pas peur”, s’est réjoui celui qui trône au sommet du classement mondial depuis plus de vingt mois. Grâce à sa prestation impeccable, le Suédois abordera la finale en deux manches en tête et avec un score vierge. Après une journée de relâche, les trente meilleurs couples seront en effet invités à courir la première manche de la finale, puis vingt affronteront un ultime parcours. 

Le numéro un français a compté sur une Dubaï du Cèdre des grands jours ce soir.

Le numéro un français a compté sur une Dubaï du Cèdre des grands jours ce soir.

© HippoFoto



Julien Épaillard grimpe sur le podium provisoire

Parmi ses principaux adversaires, Henrik von Eckermann devra se méfier de son compatriote et coéquipier des Jeux olympiques et Mondiaux Peder Fredricson. Sur son inoxydable Catch Me Not S, âgé de dix-huit ans, le double vice-champion olympique s’est montré absolument souverain aujourd’hui, délivrant deux démonstrations d’équitation, sans trop courir après la montre. Deuxième, il est idéalement placé et prêt à bondir avec seulement deux points. 

Bien lancé hier, Julien Épaillard a profité du recul de l’Allemand Hans-Dieter Dreher, piégé lors du tour initial sur le vertical n°5 avec le superbe Elysium. Sur une Dubaï du Cèdre un peu moins survoltée qu’hier, le numéro un français s’est qualifié avec une facilité insolente pour le parcours réduit. Sans chercher à risquer le tout pour le tout, lui et sa médaillée de bronze des derniers européens ont été battus sur l’oxer n°4, dont la première barre est tombée. Cinquième de l’épreuve, le duo a ainsi gravi une petite marche au classement provisoire, ce qui le place pour l’heure troisième, à exactement quatre points (donc une barre) du numéro un mondial et son petit roi. 

Peder Fredricson a les yeux rivés sur le trophée et ne semble pas prêt à laisser passer sa chance.

Peder Fredricson a les yeux rivés sur le trophée et ne semble pas prêt à laisser passer sa chance.

© HippoFoto



La très belle opération de Jill Humphrey, que personne n’attendait si haut

Surprenants et convaincants, Jill Humphrey et Chromatic BF n’ont vraiment pas été dans le rouge ce soir et voient la vie en rose.

Surprenants et convaincants, Jill Humphrey et Chromatic BF n’ont vraiment pas été dans le rouge ce soir et voient la vie en rose.

© HippoFoto

Ex-æquo avec Julien Épaillard hier grâce à Toulayna, l’Américain Kent Farrington a aujourd’hui changé de monture, comme le permet le règlement de ce championnat, pour lancer la formidable Greya. Pour son tout premier championnat, la fille de Colestus s’est montrée à la hauteur, péchant seulement sur l’oxer n°7 du tour initial. Avec six points, le duo est en embuscade à la quatrième place du classement général, juste devant une autre représentante du Stars and Stripes, Jill Humphrey, qui a réalisé la belle opération du jour. Sur Chromatic BF, un grand hongre au look atypique mais si efficace, la jeune quadragénaire a signé un double zéro décisif. Sans prendre de risque inconsidérés au barrage mais terminant tout de même troisième, celle qui n’avait pris part qu’à une seule finale du circuit indoor, en 2007, a aujourd’hui signé une belle remontada pour atterrir au cinquième rang, à sept points des leaders. Personne n’attendait ce couple si haut, pourtant, leur solidité pourrait laisser présager une happy end samedi soir. 

Parmi les réussites du jour, citons aussi celles des Belges Pieter Devos et Grégory Wathelet, tous deux qualifiés pour le barrage. Respectivement quatre et sixième ce soir, ils ont inversé la tendance après une Chasse moyenne sur l’excellentissime mais jeune Casual DV et Ace of Hearts. Les hommes de Peter Weinberg sont pour l’heure huitièmes ex æquo du général, juste derrière le champion olympique de Tokyo Ben Maher. Parmi les favoris pour le titre avec la génialissime mais délicate Dallas Vegas Batilly, il se serait bien passé de sa faute sur le milieu du triple ce soir. 

Délivrant une leçon d’équitation en entame d’épreuve, Marcus Ehning a pu signer une belle remontée au classement global sur Coolio 42. Onzième avec treize points, il lui faudra un sacré coup de pouce du destin pour espérer devenir le premier quadruple vainqueur d’une finale de Coupe du monde samedi. Comme lui, Steve Guerdat ne semble pas en route pour réussir cet exploit puisqu’il figure pour l’heure au treizième rang avec quatorze points sur Is-Minka. 

Pour son tout premier grand rendez-vous à vingt-trois ans, Jeanne Sadran a malheureusement péché à deux reprises cette fois-ci, laissant la sortie de triple et la si difficile entrée de double n°12 à terre. Cette ultime combinaison a fait quelques ravages, compte tenu de son abord et de la fragilité de sa construction, une palanque surplombant le premier élément. Malgré cela, la Toulousaine a livré une prestation propre et encourageante. Elle et son Dexter de Kerglenn sont à Riyad pour apprendre, et malgré ce score, le duo n’a que très peu reculé dans la hiérarchie. Il abordera la finale des finales au dix-septième rang avec autant de points dans l’escarcelle. 

À seulement neuf ans, Casual DV Z a crevé l’écran à Riyad.

À seulement neuf ans, Casual DV Z a crevé l’écran à Riyad.

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Ils étaient pourtant si bien lancés…

Figurant tous trois parmi les dix meilleurs hier, la surprenante américaine de dix-neuf ans Skylar Wireman, ainsi que les cadors Christian Ahlmann et Max Kühner, ont connu un jeudi compliqué. La cavalière a accusé quatre grosses fautes de Tornado, manifestement impressionné par un tel parcours, plongeant ainsi à la dix-neuvième place. Avec trois fautes de Mandato van de Neerheide, l’Allemand à la veste bleue a quant à lui reculé au treizième rang, soit quatre de mieux que l’Autrichien, qui avait préféré EIC Julius Caesar à EIC Up Too Jacco Blue aujourd’hui. Entrer dans la danse en cours de bal sur un parcours à 1,60m a semble-t-il sacrément impressionné le fils de Couleur Rubin, sur la retenue. 

Pour les trente finalistes, – soit tous les engagés n’ayant pour l’heure pas été éliminés – le vendredi sera destiné à offrir du repos à leurs partenaires, qui seront soumis à une deuxième visite vétérinaire. Celle-ci pourrait redistribuer les cartes et quelques forfaits seront peut-être annoncés d’ici samedi, 14h45, heure à laquelle l’ultime acte sera lancé. À l’issue des deux manches, le vainqueur de la quarante-quatrième édition de la finale de la Coupe du monde Longines pourra soulever le trophée emblématique et ainsi conclure la saison indoor 2023-2024. 

Le classement de l’épreuve à barrage

Le classement général

La finale de la Coupe du monde Longines commentée par Kamel Boudra et Fabienne Daigneux-Lange est à suivre en direct et en intégralité sur Clipmyhorse.tv



À NOS LECTEURS

Ces derniers jours, des médias équestres de référence, tels que nos confrères allemands de St-Georg et nos consœurs scandinaves de WorldOfShowjumping, ont annoncé leur intention de boycotter ou de limiter leur traitement éditorial des finales des Coupes du monde de dressage et/ou de saut d’obstacles, qui se tiennent cette semaine à Riyad. L’attribution de ce sommet de la saison indoor à la capitale du royaume d’Arabie saoudite résulte d’une décision de la Fédération équestre internationale (FEI), annoncée fin 2019. Dans ce pays, un très grand nombre de droits humains sont bafoués, dont ceux des femmes et des personnes appartenant à la communauté LGBTQIA+. Pour ne citer que quelques exemples, Salma al-Shehab, doctorante à l’université de Leeds, a récemment été condamnée à trente-quatre ans de prison, suivie d’une interdiction de voyager de trente-quatre ans pour ses écrits et son activité pacifique sur le réseau social Twitter; “aucun des conjoints mariés ne peut renoncer à des relations sexuelles ou à la cohabitation avec l’autre conjoint sans le consentement de ce dernier, ce qui implique un droit conjugal aux relations sexuelles”, comme l’écrit l’organisation Human Rights Watch; les opposants au régime risquent des peines de prison ou la flagellation en place publique, parmi d’autres sanctions; et l’homosexualité est pénalisée de mort…

Dans le même temps, la FEI ne cesse de promouvoir l’égalité des genres, l’inclusivité au sens large du terme, et ses actions en la matière… Questionnés à plusieurs reprises au sujet de l’incohérence entre leur parole et leurs actes, les dirigeants de la FEI ont déclaré que cette attribution était en quelque sorte un encouragement envers le royaume du Golfe à poursuivre sa politique d’ouverture et ses réformes ayant trait aux droits humains. Certes, l’Arabie saoudite progresse, mais à tout petits pas. Depuis quelques années, par exemple, les femmes ont le droit d’assister ou de participer aux événements sportifs… sous certaines conditions. Cependant, il ne faut pas s’y tromper: cela ne fait toujours pas de ce pays une terre de libertés – très loin s’en faut – mais simplement un théâtre sportif et/ou culturel un peu plus présentable. Pour le régime autocratique saoudien, par ailleurs régulièrement mis en cause pour son soutien à des groupes terroristes islamistes, il s’agit surtout d’obtenir en termes d’image le retour sur ses investissements colossaux en communication, nourris par la manne pétrolière dont il bénéficie.

Respectant pleinement les choix et la diversité des sensibilités de ses consœurs et confrères, GRANDPRIX a choisi de rendre compte des aspects sportifs de ces finales, comme la rédaction l’a toujours fait, où que se tiennent les épreuves. Il faut rappeler que des concours se déroulent de longue date en Arabie saoudite, mais aussi au Qatar, aux Émirats arabes unis, en Chine, au Maroc, en Hongrie et en Pologne, parmi bien d’autres pays où les violations des droits humains sont plus ou moins graves et fréquentes. Le choix de GRANDPRIX ne vaut nullement soutien à l’attribution de cet événement à l’Arabie saoudite par la FEI, qui tirera, à n’en pas douter, le bilan de ce choix controversé.



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