Les Britanniques déjouent les Paris, le trio français ô combien combattif arrache le bronze
Familiers des Dieux de l’olympe, Ben Maher et Scott Brash ont pu faire les présentations à Harry Charles aujourd’hui, à Versailles. Sur Dallas Vegas Batilly, Hello Jefferson et Romeo 88, les Britanniques ont réédité leur exploit de 2012 et décroché l’or olympique par équipes. Pour la troisième fois consécutive, les Américains se parent d’argent devant des Bleus combattifs, portés par un sans-faute inoubliable d’Olivier Perreau et son produit maison GL Events*Dorai d’Aiguilly.
Grégory Bodo et Santiago Varela, les chefs de piste des Jeux olympiques de Paris 2024, n’ont pas eu la main légère en concoctant le parcours de la finale par équipes, dans les jardins de château de Versailles. Lancée à 14h, la compétition a offert un tracé ponctué de somptueux obstacles représentant quelques joyaux de l’Hexagone, dont la tour Eiffel, l’Arc de Triomphe, les champs de lavande, les bistrots parisiens, le cinéma des frères Auguste et Louis Lumière, la haute-couture, Notre Dame de Paris, ou encore le parfum français. Au total, ce sont quatorze obstacles et dix-huit efforts qu’il fallait impérativement laisser intacts pour espérer gravir le podium. Spécificité olympique, tous les scores ont été remis à zéro, ouvrant le champ des possibles aux neuf équipes en lice. Parmi les dix qualifiés, le Mexique a en effet dû déclarer forfait peu avant le début de l’épreuve, Porthos Maestro WH Z, la monture de Carlos Hank Guerreiro, n’étant en effet pas apte à concourir et le drapeau mexicain n’ayant plus de joker après le refus de Contendo 2, partenaire d’Andres Azcarraga, à la visite vétérinaire.
Ouvreur de la compétition, Robin Muhr a difficilement lancé Israël avec treize points de Galaxy HM. Les choses ne se sont pas arrangées avec les vingt points d’Ashlee Bond et Donatello 141, qui ont réduit à néant leurs chances, et poussé Daniel Bluman à ne pas s’élancer sur Ladriano Z. Le vent a aussi rapidement tourné pour la Belgique, avec les huit points du pourtant prodigieux Ermitage Kalone, sous la selle du jeune Gilles Thomas. Toujours impeccable, le phénomène alezan a cette fois péché sur la sortie de triple et l’ultime oxer représentant les vignes françaises. Ni Wilm Vermeir, ni Jérôme Guéry, respectivement sur Iq van het Steentje et Quel Homme de Hus, n’ont réussi à maintenir le Plat Pays à flot, puisqu’ils terminent au huitième rang. Le rêve du Namurois d’obtenir une médaille avec son vice-champion du monde individuel, de retour à dix-huit ans après une grave blessure tendineuse, n’a donc pu se concrétiser pour le moment. Le trio de Peter Weinberg avait pourtant de quoi impressionner, le sélectionneur s’étant offert le luxe de se passer de Grégory Wathelet et son formidable Bond Jamesbond de Hay, qui entreront dans la danse dans la compétition individuelle à la place de Wilm Vermeir.
Encore dans la course à la médaille après le somptueux sans-faute de Daniel Coyle et Legacy, l’Irlande a quant à elle bu le bouillon après les huit points de Cian O’Connor et Maurice.
Après avoir remporté l’or olympique en 2021, mondial en 2022 et européen en 2023 et alignant une équipe de rêve, la Suède avait de bonnes raisons de prétendre à un nouveau sacre. La folle série du collectif jaune et bleu s’est toutefois stoppée nette dans les jardins du château, chaque couple ayant aujourd’hui écopé de quatre points. Les doubles champions du monde Henrik von Eckermann et son génie King Edward Ress se sont arrachés, mais la difficile palanque n°11 représentant les champs de lavande du Sud s’est mise en travers de leur route. Comme hier, Rolf-Göran Bengtsson et le sublime Zuccero HV ont survolé toutes les difficultés, à l’exception du premier obstacle – le moins haut et technique – porté par les bonnets phrygiens. Victime d’un refus hier, Peder Fredricson ne s’est pas laissé piéger cette fois, écartant davantage son virage avec Catch Me Not S, mais fautant sur la triple barre. Douze points pour les hommes d’Henrik Ankarcrona, qui finissent à la sixième place derrière une autre nation favorite.
Absolument souverains hier, terminant la qualificative en tête avec un score vierge, les Allemands n’ont pas montré pareille domination aujourd’hui. Le double n°3 a été fatal aux pourtant agiles United Touch S et Checker 47, partenaires de Richard Vogel et Christian Kukuk. Le formidable sans-faute de Philipp Weishaupt et Zineday n’y a rien changé, les Allemands terminent cinquièmes.
On prend quasiment les mêmes qu’en 2012, et on recommence !
Dans la bataille pour le podium, il semble qu’il fallait aujourd’hui représenter un drapeau portant uniquement du bleu, du, blanc et du rouge, la Grande-Bretagne, les États-Unis, la France et les Pays-Bas s’étant livré une bataille sans merci. Avec une double fracture au bras d’Harry Charles, un changement de cheval de dernière minute pour Ben Maher et une saison en dents de scie pour Scott Brash, les hommes de Di Lampard n’étaient pas les favoris des parieurs. Et pourtant… !
Lancés par Ben Maher, les Britanniques ont pris les devants d’entrée de jeu, le champion olympique individuel de Tokyo 2021 parvenant à déjouer tous les pièges avec l’excellente Dallas Vegas Batilly, qui a brillamment pris le relais de Point Break, initialement prévu pour ce championnat. Comme trois autres chevaux français sur ce podium, la caractérielle baie a une nouvelle fois mis en lumière la qualité des formateurs tricolores, celle-ci ayant atteint le haut niveau avec le Nordiste Nicolas Delmotte.
Malgré deux fractures au bras, contractées lors d’une chute début juillet au CHIO d’Aix-la-Chapelle, Harry Charles s’est montré tout à fait à la hauteur pour ses deuxièmes JO, à tout juste vingt-cinq ans. Grâce à Romeo 88, celui qui s’est fait un prénom au fil des dernières saisons n’a pas tremblé et s’est montré intouchable sur ce parcours. Maher, Brash et Charles, voilà trois patronymes qui ne sont pas sans rappeler le podium par équipes des Jeux olympiques de Londres, en 2012… Pour cause, Ben Maher et Scott Brash avaient décroché l’or olympique aux côtés de Nick Skelton et Peter Charles, le père d’un certain… Harry ! “La différence ? Il est simplement plus beau que son père !”, s’est amusé Scott Brash, dont les nerfs ont été mis à rude épreuve. L’ancien numéro un mondial a été le dernier à entrer en piste aujourd’hui, l’ordre de passage de la dernière rotation étant mis à jour en fonction du classement provisoire. Lorsque Hello Jefferson a posé le sabot sur le sable versaillais, l’unique cavalier à avoir réussi le Grand Chelem de saut d’obstacles savait qu’il tenait le destin de son pays entre les mains. Malgré un début de saison difficile, l’Écossais et son hongre de quinze ans n’ont pas tremblé et porté au sommet l’Union Jack. Ayant déjà côtoyé les Dieux de l’olympe, Ben Maher et Scott Brash ont donc pu faire les présentations à Harry Charles, très ému en conférence de presse en évoquant son père, qui le soutient toujours énormément.
Le conte de Perreau à la fin heureuse
À 16h04 ce vendredi, les tribunes versaillaises ont failli exploser lorsque le collectif tricolore composé de Simon Delestre, Olivier Perreau et Julien Épaillard a posé ses bottes sur la troisième marche du podium. Après des turbulences mercredi, le cheval de Kevin Staut, Scuderia 1918 Viking d’la Rousserie, n’ayant pas passé la visite vétérinaire, et une qualificative délicate, les Bleus ont réussi à se remobiliser de belle manière.
Simon Delestre a idéalement lancé le trio, parvenant à ne faire tomber aucune barre sur I Amelusina R 51, mais sortant de piste avec trois points de temps dépassé. Levant le poing en sortant de piste, le Lorrain de quarante-trois ans arrache enfin sa première médaille olympique, après une rêne cassée à Londres, la blessure du crack Hermès Ryan des Hayettes à Rio de Janeiro et la déconfiture des Bleus, en position de décrocher l’or, à Tokyo.
L’un des grands acteurs de ce podium français n’est autre qu’Olivier Perreau, qui court ici ses tous premiers JO et n’aurait initialement pas dû s’illustrer face au château. Pour cause, le Roannais avait été sélectionné par Henk Nooren comme remplaçant, et a donc dû enfiler la veste bleue après le retrait forcé de Kevin Staut. Juché sur sa fidèle GL Events*Dorai d’Aiguilly, née dans l’élevage familial, l’homme de trente-huit ans si mesuré et discret a littéralement enflammé les tribunes, après les avoir faits frissonner à chaque saut. En étant le premier de l’épreuve à réussir un sans-faute, celui-ci a laissé filé ses rênes et levé les poings au ciel, réalisant l’exploit qu’il venait d’accomplir. Les contes de Perrault, représentés par un obstacle sur la piste versaillaise, ont laissé place au conte de Perreau, dont la seule morale est que l’abnégation et le travail peuvent mener à une médaille de bronze olympique.
Pilier de la composition, Julien Épaillard avait une pression écrasante sur les épaules avec la bouillonnante Dubaï du Cèdre, habituée des podiums ces deux dernières saisons. Fautifs sur l’oxer n°9 malgré un magnifique tour, tous deux ont mené le score de la France à sept points, comme les Pays-Bas. Le règlement voulant que le cumul des chronomètres départage les équipes, les Bataves ont dû abandonner leur rêve de podium pour cinquante-sept centièmes de retard. La pilule est dure à avaler pour les Oranje de Jos Lansink, notamment portés par Harrie Smolders sur Uricas van het Kattevennen et celle qui aurait aussi dû être remplaçante, Kim Emmen avec Imagine.
Menant savamment leur barque jusqu’au podium, les États-Unis ont réussi à décrocher leur troisième médaille d’argent par équipes consécutive aux Jeux. Mené par Robert Ridland, le Stars and Stripes a pu compter sur les véritables démonstrations de Karl Cook et McLain Ward. Ce dernier ajoute une cinquième médaille olympique par équipes à son palmarès grâce à Ilex, un surpuissant et joueur bai qu’il ne monte que depuis moins de deux cents jours, grâce à une transaction comptant de nombreux zéros et en vue des JO. Ayant lui aussi fait un sacré chèque pour acquérir sa monture début 2023, le Californien Karl Cook a réussi son pari avec la génialissime Caracole de la Roque, qui partage donc le podium avec son ancien cavalier Julien Épaillard. Ayant évoqué la potentialité que Paris 2024 soit sa dernière apparition olympique, Laura Kraut a fini en beauté avec Baloutinue, participant à cette médaille malgré une faute sur l’entrée de triple.
Quatre jours après le complet en argent, l’équitation française a donc ajouté une nouvelle médaille à son compteur. Pour la compétition individuelle, il faudra patienter jusqu’à la qualificative de lundi, le week-end étant consacré au dressage, dont les médailles seront décernées demain et dimanche.
La réaction de Julien Épaillard