À vingt-neuf ans, Simone Blum entre dans la légende des sports équestres!

Au terme d’une sublime finale individuelle, cet après-midi à Tryon, où s’achèvent les huitièmes JEM, Simone Blum est devenue la deuxième femme, après la Canadienne Gail Greenough en 1986, à être sacrée championne du monde de saut d’obstacles. Avec la stratosphérique DSP Alice, elle succède à Jeroen Dubbeldam, Philippe Le Jeune, Jos Lansink, Dermott Lennon, Rodrigo Pessoa, Franke Sloothaak, le dernier Allemand couronné dans cette compétition, et Éric Navet. La Suisse glane les deux premières médailles individuelles de son histoire grâce à Martin Fuchs et Steve Guerdat, sublimes avec Clooney 51 et Bianca. Et la France peut applaudir Alexis Deroubaix, très beau neuvième avec Timon d’Aure.



Martin Fuchs décroche une superbe médaille d'argent grâce à Clooney 51.

Martin Fuchs décroche une superbe médaille d'argent grâce à Clooney 51.

© Scoopdyga

Bien sûr, il y eut la Française Janou Lefèbvre, en or à deux reprises avec Rocket, en 1970 à Copenhague et 1974 à La Baule, mais il s’agissait de championnats féminins, les cavalières n’étant alors pas admises à participer aux vrais Mondiaux. Mais la première femme véritablement sacrée championne du monde fut Gail Greenough, en 1986 à Aix-la-Chapelle. Avec Mr. T, la Canadienne avait alors vaincu l’Américain Conrad Homfeld (Abdullah), le Britannique Nick Skelton (Apollo) et le Français Pierre Durand. «Je suis toujours autant surprise d’être la seule femme à avoir gagné ces championnats...», disait-elle il y a quelques semaines dans son entretien accordé à GrandPrix-replay.com. Aujourd’hui, elle n’est plus seule et elle a dû goûter la performance ahurissante de celle qui lui a succédé. «Pour moi, être une femme ou un homme n’a pas d’importance. Je suis juste championne du monde et infiniment heureuse. Je ne peux pas décrire ce que je ressens tellement c’est fort», a déclaré Simone Blum, qui se mariera dans un mois tout juste avec l’homme de sa vie, qui lui a trouvé l’époustouflante DSP Alice!
 
Cette année à Tryon, l’ancien Final Four a été rangé aux oubliettes, mais le sport n’en a pas pâti et la jeune Bavaroise n’en est pas moins devenue la digne héritière de tous les anciens champions du monde. Deuxième cavalière à décrocher l’or, l’amazone de vingt-neuf ans est aussi la sixième Allemande après Hans Günter Winkler, en 1954 et 1955, Hartwig Steenken en 1974, Gerd Wiltfang en 1978, Norbert Koof en 1982 et Franke Sloothaak en 1994. Vertigineux. La Mannschaft, déjà médaillée de bronze par équipes vendredi, attendait donc cela depuis vingt-quatre ans.
 


Pourvu que Timon reste sous la selle d’Alexis Deroubaix !

Alexis Deroubaix peut être fier de ses premiers championnats !

Alexis Deroubaix peut être fier de ses premiers championnats !

© Scoopdyga

Après une première manche déjà extraordinaire de suspense, la seconde, disputée devant des tribunes bien plus garnies à défaut d’être pleines, n’a sûrement pas déçu les fans de très grand sport. Un peu moins exigeant, le parcours de Alan Wade demandait tout de même quinze efforts à de vrais pilotes, capables d’aborder chaque difficulté au millimètre près, et des chevaux frais, puissants, intelligents, parfaitement dressés… et rapides! En effet, l’Irlandais a encore une fois serré le temps imparti, ce qui a eu pour effet de renforcer un peu plus la dramaturgie de cette épreuve. Ainsi, Adrienne Sternlicht, première à repartir avec l’extraordinaire Cristalline, a non seulement renversé les barres de Spa placées en numéro 6 mais aussi concédé deux points de temps! L’Américaine pourra toutefois se satisfaire de sa onzième place pour ses premiers championnats, où elle a pleinement contribué au sacre de son équipe.
 
Deuxième à s’élancer, Alexis Deroubaix a conclu le premier grand rendez-vous de sa carrière par un nouveau très beau parcours, où le fabuleux Timon d’Aure n’a concédé qu’une faute sur l’oxer 10, et encore, surtout parce que le Français a tenté de rentrer dans le temps. Le Nordiste installé en Normandie s’est fait un nom devant ce parterre de stars qu’il n’aurait jamais imaginé côtoyer il y a un an! Chapeau à lui, neuvième au général, à Annick et André Chenu, propriétaires de Timon, qui lui ont permis de vivre cette belle aventure, et à Philippe Guerdat qui a eu raison de croire en lui. Maintenant, puisqu’il est à vendre, il faut espérer que le gris restera sous sa selle et pour l’équipe de France, qui a besoin de ce couple dans sa rude quête de qualification olympique, qui l’occupera une bonne partie de l’année 2019.
 
Autre révélation de ces JEM, le couple formé par Rowan Willis et Blue Movie a également péché sur la Spa en tentant de couper court dans le virage précédent, puis sur le gros oxer 12. L’Australien termine ainsi douzième. Tout aussi rookie, le Suédois Fredrik Jönsson ne faute qu’au passage de l’oxer 10 sur bidet et face au temps, pour terminer huitième avec Cold Play. Très impressionnants lors de la Chasse et à peine moins lors de la très dure épreuve par équipes, Carlos López et Admara 2 signent alors le premier sans-faute aux obstacles, ne lâchant qu’un point. Le Colombien ne reste pas longtemps en tête, mais peut se satisfaire de sa cinquième place, d’autant que son cheval a sauté de manière bien plus naturelle et harmonieuse qu’en avril à Paris – il faut le saluer.
 


McLain Ward n’y arrive toujours pas…

Superbe troisième place de Steve Guerdat et Bianca !

Superbe troisième place de Steve Guerdat et Bianca !

© Scoopdyga

 Pas de faute non plus pour McLain Ward et Clinta, toujours très, très aérienne, qui ne lâchent qu’un point. Le stade explose alors de joie pour son héros de vendredi, mais l’Américain ne finira que quatrième, mieux qu’à Caen en 2014 (cinquième), Lexington en 2010 (septième) et Aix-la-Chapelle en 2006 (septième), mais toujours pas sur le podium… Pas de médaille non plus pour sa compatriote Laura Kraut, excellente avec Zeremonie mais pénalisée sur l’oxer 8b placé au milieu du triple, sur le vertical 11 et face au chrono. Elle finit dixième. Et pas de podium pour l’Italien Lorenzo de Luca, qui pèche lui aussi sur les barres de Spa et concède un point avec Irenice Horta… qu’il ne monte en concours que depuis trois mois. Pas si mal!
 
Mieux encore, Steve Guerdat et Bianca signent le seul et unique double sans-faute de cette épreuve. Vainqueur de la Chasse mais pas chanceux dans l’épreuve par équipes, avec une faute dans chaque manche, ce couple à la fois fusionnel et explosif atteint ici le sommet de son art. Cette merveilleuse partition offre au champion olympique de Londres et sa protégée une médaille de bronze amplement méritée. Après s’être effondrée par équipes il y a deux jours, la Suisse a vécu l’un de ses plus grands jours aujourd’hui, puisque Martin Fuchs, qui n’a pas eu peur de lâcher deux points avec un Clooney 51 absolument impeccable et aux ordres, double son ami, qu’il considère comme un frère, pour se hisser sur la deuxième marche du podium. Magnifique.
 
Ce podium aurait pu être 100% germanique si Max Kühner, Allemand montant depuis quelques années pour l’Autriche, n’avait pas renversé le vertical 9 et l’oxer 10 avec Chardonnay, presque aussi brillant que Clooney, gris et fils comme lui du génial Cornet Obolensky. Dure conclusion pour le meilleur amateur du monde, qui rétrograde à la sixième place finale… Pour Simone Blum, le destin – et surtout elle-même – en avait décidé autrement. Juchée sur sa pépite alezane, la Munichoise franchit tous les obstacles sans trembler, sans frémir, sans perdre pied ni s’en remettre à la chance. Et elle triomphe, encore exceptionnelle de classe et de maîtrise, elle qui ne vit que sa deuxième saison à haut niveau. “Hard work pays off”, résume-t-elle. Oui, le travail paie, et plus encore quand il est associé à un tel talent et à un tel cran. Chapeau, Simone!

Le classement final ici
Le parcours de la première manche
Le parcours de la seconde manche