Oleksandr Onyshchenko arrêté en Allemagne et bientôt extradé en Ukraine?

Oleksandr Onyshchenko a été arrêté la semaine passée en Allemagne et pourrait prochainement être extradé en Ukraine, son pays d’origine, où il fait l’objet de procédures judiciaires pour corruption, détournement de fonds et intelligence avec des puissances étrangères. Le magnat, cavalier, propriétaire, ancien député et un temps candidat à la présidence de l’Ukraine, aurait récemment déclaré disposer d’informations au sujet de l’affaire à l’origine de la procédure de destitution en cours à l’encontre de Donald Trump, président des États-Unis.




En fin de semaine, plusieurs médias étrangers ont annoncé l’arrestation d’Oleksandr Onyshchenko, alors que celui-ci se trouvait en Allemagne, vraisemblablement près de Brême. Selon The Daily Beast, média américain indépendant, ce fait serait lié aux efforts des proches du président américain Donald Trump pour trouver des informations sur Burisma Group, dont Hunter Biden, le fils de Joe Biden, ancien vice-président et possible adversaire démocrate de Trump aux élections de 2020, était un membre du conseil d’administration. “Rudy Giuliani, avocat personnel de Trump (et ancien maire de New York, ndlr), est actuellement à Kiev, en Ukraine, pour tenir des réunions sur le sujet. Les efforts de Giuliani et d’autres responsables de l’administration Trump pour gagner des cadeaux politiques de la part des responsables du gouvernement ukrainien – y compris l’ouverture d’une enquête sur Burisma – sont au centre de l’enquête de destitution des démocrates contre le président Donald Trump”, rappelle l’article.
 
Les autorités allemandes auraient arrêté Oleksandr Onyshchenko sur la base d’une demande du Bureau national anti-corruption ukrainien et du Bureau du procureur anti-corruption. Les responsables ukrainiens attendraient désormais une décision d’un tribunal allemand sur l’opportunité d’extrader le richissime cavalier olympique et propriétaire de chevaux, ancien député mais aussi ancien président de la Fédération équestre ukrainienne. De leur côté, ses avocats feraient valoir que l’ancien oligarque ne pourrait pas être arrêté conformément à l’article 33 de la convention internationale relative au statut des réfugiés. De fait, il cherche depuis plusieurs années, vraisemblablement sans succès, la protection d’un pays occidental. Comme GRANDPRIX l’avait rappelé il y a quatorze mois, ses demandes de visa avaient été rejetées en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Espagne. Le sulfureux homme d’affaires, en grand froid avec l’ancien président ukrainien, Petro Porochenko, avait sorti un livre et envisageait alors, peut-être depuis la Normandie, de se présenter à la présidentielle.
 
Finalement, il n’en fut rien. Il aurait été empêché de se présenter du fait justement qu’il ne résidait plus dans son pays depuis plusieurs années. Depuis, le 20 mai dernier, Volodymyr Zelensky, un humoriste, producteur, acteur, scénariste et réalisateur de quarante et un ans, a été élu président de l’Ukraine. De son côté, Oleksandr Onyshchenko a poursuivi sa carrière de cavalier, apparaissant en compétition à Oliva et Barcelone, en Espagne, en selle notamment sur Saxo de la Cour et Valentino Velvet, anciennes montures de Cédric Angot et Simon Delestre, mais aussi sur Gain Line, qu’il avait un temps confié au Lorrain puis à Pénélope Leprevost, et concourant aussi à Gorla Minore et Busto Arsizio, en Italie, à Hagen, en Allemagne, ou encore à Budapest, en Hongrie, à Šamorín, en Slovaquie, et à Grimaud, en France. Bref, en apparence, il semblait relativement libre de ses déplacements.
 


Une surenchère de l’invraisemblable


Différences sources ont indiqué à The Daily Beast que l’Ukrainien souhaitait partager des informations avec les autorités américaines dans l’espoir d’obtenir un visa pour les États-Unis. Le département américain de la Justice aurait confirmé l’avoir rencontré, sans toutefois donné suite à l’entretien. Alors que la procédure de destitution contre le président Trump a été lancée cet automne, Onyshchenko aurait affirmé avoir été interrogé sur Hunter Biden et son travail pour Burisma. Début novembre, il a déclaré au site CD Media qu’il y avait eu des paiements “officiels” et “non officiels” effectués par Burisma à la famille Biden. Plus tard, il a déclaré au même site que Burisma avait versé 10 millions de dollars à la campagne présidentielle d’Hillary Clinton, adversaire de Trump lors de la dernière présidentielle américaine, par le biais de “gros sacs d’argent”. À l’annonce de son arrestation, le même site a publié un article assurant qu’il se rendait aux États-Unis pour témoigner contre la famille Biden, s’appuyant sur une capture d’écran d’une demande de visa américain qu’il aurait prétendument soumise la semaine précédente à l’ambassade américaine de Budapest…
 
Dans la presse ukrainienne, notamment dans le Kyiv Post, on entend évidemment un tout autre son de cloche. On y décrit Oleksandr Onyshchenko comme un bandit en fuite, qui aurait promis à plusieurs reprises de rentrer au pays pour faire face à ses accusations, sans jamais le faire. Il aurait récemment déclaré à des journalistes de ce média résider dans un village espagnol et être libre de se rendre en Ukraine pour effectuer une déposition puis de rentrer en Espagne, ce que ceux-ci contestent. Détail croustillant, il aurait fourni en guise de preuve de sa volonté de coopérer avec la justice un billet aller-retour Barcelone - Kiev acheté à la compagnie régulière… Ryan Air! Un voyage low cost qui semble à mille lieux de la vie de jet-setter qu’il expose à longueur d’année sur son compte Instagram…
 
L’autorité ukrainienne anti-corruption prétend également avoir gelé un avoir de 500.000 euros déposé sur un compte en Estonie. Onyshchenko a contesté cette saisie sur Facebook et aurait expliqué au Kyiv Post que cet argent était destiné à payer l’achat d’Oak Grove’s Laith, un étalon de huit ans né sous le nom de Bentley de Riverland et formé par l’Allemand Harm Lahde. Selon les données déclarées à la Fédération équestre internationale, le Selle Français aurait été vendu le 7 août au Libanais Patrick Rubeiz, propriétaire d’autres chevaux montés par Harm Lahde. L’Ukrainien assure de son côté l’avoir acheté et rapidement revendu. Qui dit vrai? Qui dit faux? Impossible à savoir, comme toujours. Ainsi va la vie, pleine de rebondissements, d’un homme qui a décidément tout d’un personnage de roman.