'GAGNER FLORAC, C'EST GAGNER UN TOURNOI DU GRAND CHELEM !'



Vainqueur samedi dernier de la mythique CEI 3* de Florac avec Easy Font Noire, Laurent Mosti revient, pour GrandPrix-replay.com, sur un week-end chargé en émotions.


Grandprix-Replay.com : Depuis vos débuts ensemble, en Jeunes Chevaux, à la suite desquels votre femme Cécile avait pris la relève, on avait presque oublié que vous formiez un si beau couple avec Easy Font Noire ?
Laurent Mosti : C’est effectivement une jument que j’ai débutée en épreuves Jeunes Chevaux, à six et sept ans, à l’entraînement et en compétition. Puis Cécile l’a récupérée dans l’année des huit ans, durant laquelle elles ont ensemble couru les Jeux équestres mondiaux de Lexington (contribuant à la médaille d’argent par équipe de la France, ndlr). L’an dernier, elles ont participé à la President Cup à Abu Dhabi, terminant dixièmes et meilleur couple européen. La jument a ensuite été absente pour une légère boiterie et est revenue cette année dans la CEI 3* de Fontainebleau, qu’elle remporte avec Cécile. La jument a alors décroché sa présélection pour Euston Park mais Cécile a été accidentée. En accord avec les propriétaires de la jument, Catherine et Jacques Faure, les parents de Cécile et la sélectionneuse nationale, j’ai tout de même participé à deux des trois premiers stages de sélection en équipe de France avec Easy. Nous ne sommes en revanche pas allés au troisième car nous savions que Cécile ne serait pas prête pour le championnat.

 
 
GPR. : Florac est donc devenue à ce moment-là un objectif de la saison d’Easy ?
L.M. : La jument était en effet préparée pour les stages de sélection, il aurait été dommage de l’arrêter en si bon chemin. J’ai donc demandé à Cécile, qui reste sa cavalière attitrée, si elle voulait bien me « prêter » Easy pour courir Florac. Elle m’a répondu : « J’accepte de te la prêter à condition que tu remportes la course ! » (rires) C’est une jument qui a une très grande expérience des courses plates, de vitesse, on connaissait son extraordinaire mental mais cette course dans la montagne suscitait tout de même quelques interrogations.

 
 
GPR. : A l’entraînement, en vue de Florac, avez-vous montré un peu de dénivelé à Easy ?
L.M. : Non ! Elle a finalement très peu couru sur ce profil de course. Elle avait juste à son actif la première course de 120 km à laquelle elle avait participé, à Vittel.

 
 
GPR. : C’était la première fois que l’élevage Font Noire, propriétaire d’Easy, engageait l’un de ses chevaux à Florac. Avant le départ, ressentiez-vous une certaine pression ?
L.M. : Je suis arrivé très serein à Florac, la veille de la course, jour des contrôles. Mais dès les premières heures sur place, beaucoup de personnes ont commencé à me charrier, en me disant qu’avec une telle jument, je ne pouvais que gagner. La pression est donc montée progressivement (rires).

 
 
GPR. : Est-ce cette pression qui explique votre stratégie de partir rapidement, seul, dès le départ ?
L.M. : J’avais décidé de mettre du train sur les deux premières étapes. Je pensais me faire rattraper sur la troisième étape, celle qui monte au sommet de l’Aigoual (1.565m d’altitude, ndlr). On annonçait de la chaleur et pour ne pas être pénalisé dans les vet-gates par une récupération cardiaque moins rapide que celle d’autres chevaux, je me devais de partir devant. Mais je pensais tout de même qu’un petit groupe se créerait en tête. Pourtant, dès la première étape, après huit ou neuf kilomètres, je me suis rendu compte que j’étais déjà seul. Toute la course s’est passée ainsi, je prenais de l’avance en piste sur les concurrents. Sur les deux dernières étapes, j’ai régulièrement soulagé la jument en courant à ses côtés dans les descentes, notamment pour économiser ses articulations.

 
 
GPR. : Finalement, dans la carrière d’un cavalier, est-ce que gagner Florac procure réellement cette impression d’accomplissement que décrivent bon nombre de vos prédécesseurs ?
L.M. : Je confirme ! Florac est une course mythique, que tout le monde connaît dans les sports équestres. Un cavalier de CSO qui ne connaît pas précisément l’endurance connaîtra tout de même Florac. C’est vraiment l’équivalent d’un tournoi du Grand Chelem pour un tennisman ! Pour rire, j’avais dit il y a quelques années que le jour où je gagnerais Florac, j’arrêterais l’endurance pour retourner au concours hippique ! Je blaguais, évidemment ! (rires) Ce qui a été remarquable sur cette course, c’est aussi d’avoir la meilleure condition le lendemain, pour Easy. Cette reconnaissance me confirme que j’ai été à l’écoute de ma jument et qu’elle n’a pas du tout été affectée par sa course. A la maison, cette semaine, elle est en très grande forme !

 
 
GPR. : Appréciez-vous ce profil de courses, dans la montagne, avec du dénivelé ?
L.M. : Je reconnais préférer les courses plates car j’aime la vitesse et que ces courses galopantes sont plus techniques. Sur une course de vitesse, si on fait une erreur, en avançant par exemple en surrégime, on ne le voit pas immédiatement mais on peut le payer cher sur la dernière étape, avec un cheval qui cale par exemple. Dans la montagne, le cheval aura tendance à se réguler plus rapidement. J’ai plus de sensation sur une course de vitesse qui, bien gérée, n’a aucune raison de plus abimer un cheval, contrairement à ce qu’on entend parfois.

 
 
GPR. : Cet été, alors que vous étiez sélectionné dans l’équipe de France pour les Mondiaux d’Euston Park, vous avez dû déclarer forfait pour un petit problème de votre cheval Kilim de Fignols. Comment va-t-il aujourd’hui ?
L.M. : Il se porte comme un charme. En déferrant au paddock, sur place, à Euston Park, le cheval s’est donné un petit coup au sabot et avait un petit hématome. Quatre jours plus tard, il n’y avait plus rien ! Il va très bien aujourd’hui et si je reçois des invitations pour des courses dans le désert cet hiver, je le prendrai certainement. Sinon, il ne ressortira que l’année prochaine, pour la première course de sélection à Fontainebleau.

 
 
GPR. : Sur les photos de votre victoire de Florac qui circulent depuis samedi sur les réseaux sociaux, on retrouve avec une grande joie votre femme Cécile, grièvement blessée en mai à la suite d’une chute de cheval. Comment se porte-t-elle aujourd’hui ?
L.M. : Cécile va mieux. Le rétablissement suit son cours, c’est en bonne voie. A Florac, elle a retrouvé pour la première fois depuis son accident la grande famille de l’endurance. Ç’a été un peu difficile pour elle puisqu’elle était à pied et ne pouvait pas non plus faire mon assistance car encore un peu faible. Au final, ça lui a fait un bien fou et sacrément boosté son moral. C’était pour nous tous très émouvant.

 
 
Propos recueillis par Daniel Koroloff