Comment choisir un cheval en fonction de son profil

Si posséder un cheval qui correspond à ses attentes est un pur bonheur, le trouver n’est jamais chose aisée. Du moins, cela nécessite de respecter certaines règles usuelles. Selon le profil du cavalier, la monture adaptée ne sera pas la même. Voici un mode d’emploi aussi exhaustif que possible, élaboré en collaboration avec des professionnels reconnus en la matière. 



De toute évidence, tous les cavaliers ne cherchent pas forcément le même cheval. Une monture jugée parfaite pour certains ne le sera pas pour d’autres, en fonction de leurs goûts ou de leur profil. C’est pourquoi trouver “son” cheval reste un défi, avec des enjeux qu’il ne faut pas négliger. D’abord, il faut bien se connaître en tant que cavalier. Ensuite, on doit bien définir ses objectifs, notamment en termes de discipline et de niveau de compétition. Le profil du cheval recherché n’est définitivement pas le même pour un jeune cavalier souhaitant se lancer sur le circuit Juniors, un amateur désireux d’être performant à 1,20 m, ou un semi-professionnel qui souhaite dénicher un jeune cheval à former et valoriser sur le Cycle classique de la Société hippique française, pour le revendre ensuite.

Se connaître soi-même 

Un cavalier recherchant une monture à acquérir doit définir le type de cheval qu’il affectionne. Ce faisant, il doit se montrer lucide envers lui-même en tant que pratiquant. “La lucidité est le maître-mot lorsque l’on veut acheter un cheval”, développe Arnaud Évain, éleveur, étalonnier, marchand et ancien président de l’agence Fences. “Il faut avoir clairement conscience de ses caractéristiques de cavalier, de ses objectifs sportifs et de son niveau, et fixer un cahier des charges en fonction de cela. Veux-je me faire plaisir en déroulant des parcours tranquillement et en construisant de bons abords, ou bien est-ce que je préfère terminer dans les trois premiers? C’est comme quand on loue des skis: on va vous demander votre niveau et ce que vous allez faire avant de vous confier une paire. Et celle-ci ne sera pas la même si vous voulez foncer dans un champ de bosses ou descendre de larges pistes en dessinant tranquillement d’élégants virages. Une personne qui monte très assise ne pourra pas se hisser sur le même cheval qu’un cavalier très léger en selle. Comme il est difficile de s’évaluer soi-même, je préconise de se faire conseiller et accompagner dans cette démarche, par un entraîneur par exemple, notamment lors d’un essai. Il faut aussi savoir frapper à la bonne porte, et s’assurer que la personne à qui l’on va acheter le cheval le connaisse vraiment bien.”

 




À chaque profil, un cheval différent

Définir des critères de sélection de façon raisonnée permet de ne pas se laisser happer par un coup de cœur trop hâtif, souvent source de déception a posteriori. Adeline Wirth-Nègre, coach spécialisée dans le hunter, écrivaine et codirigeante des écuries du Grand Veneur avec Édouard Coupérie, à Barbizon, livre son regard sur la question. “Pour un amateur, je recommande un cheval classique, doté d’une bonne bouche, cadencé, avec un équilibre plutôt vertical. Il doit se tenir sans avoir besoin de la main de son cavalier, et rester franc devant l’obstacle. Il peut être un peu lent, mais ce n’est pas grave. Plus un cheval sortira de ces critères basiques, plus il sera délicat, et donc a priori moins adapté à un non-professionnel. Il faut se rappeler l’adage: à jeune cavalier, vieux cheval. Par vieux, on n’entend d’ailleurs pas forcément âgé, mais expérimenté et le plus prévisible possible. L’âge n’entre pas forcément en ligne de compte, car un équidé de six ou sept ans peut convenir à un amateur ou un cavalier peu expérimenté, s’il a été bien formé. À un amateur, je conseillerais aussi de choisir un cheval dont le niveau est supérieur aux épreuves qu’il compte courir, afin que le cheval soit toujours dans la facilité et puisse ainsi aisément pardonner les inévitables erreurs d’inexpérience de son partenaire. À un jeune qui souhaiterait se lancer sur le circuit Juniors, je recommanderais plutôt un cheval qui a évolué à haut niveau car il connaît son métier. Quant à l’achat d’un jeune que l’on aimerait former sur les Cycles, il faut vraiment se renseigner et savoir comment l’équidé a été éduqué. Il faut donc bien choisir l’éleveur ou le vendeur, et être sérieusement encadré.” À noter qu’Adeline Wirth-Nègre et l’équipe du Grand Veneur, composée d’Édouard et Baptiste Coupérie, ainsi que de Kyle Timm, ont tout récemment lancé un nouveau concept: chaque semaine, un cheval est mis en vente en ligne avec photos, vidéos et compte-rendu de la visite vétérinaire. Les acheteurs potentiels ont une semaine pour l’essayer et proposer un prix, et le cheval est cédé au plus offrant au terme d’une période impartie.

Le bon prix  

Combien coûte la monture de ses rêves? Voilà une question épineuse… Arnaud Évain déplore le fait qu’il n’existe pas d’Argus en la matière, comme un barème sur lequel s’appuyer en fonction de l’âge du cheval, de ses origines, de ses performances, de son état de santé, etc. De fait, un cheval de quatorze ans ne vaudra pas le même prix qu’un cheval de dix ans à l’apogée de sa forme, ou qu’un cheval en bonne santé mais dont la visite vétérinaire n’est pas parfaite. “Un cheval vaut le prix qu’on est prêt à y mettre. Pour courir en Amateur 2 par exemple, on peut aussi bien en trouver à 7 000 qu’à 40 000 euros. La différence se situe uniquement au niveau des attentes du potentiel client. Si l’on compare avec une voiture, il y a, par exemple, une différence notable entre une Dacia et une Audi, ou encore entre une voiture qui a quatre portes et un autoradio, et un modèle toutes options. Pourtant, les deux roulent très bien!” En la matière, il faut aussi se montrer raisonnable, et tenir compte à la fois de ses projets et de l’épaisseur de son porte-monnaie. “Il faut arrêter de chercher un cheval pour sauter 1,30 m avec un budget de 6 000 euros!”, alerte Adeline Wirth-Nègre. “Même si les bonnes occasions peuvent arriver, et que les belles histoires, comme celle du poulain acheté pour une bouchée de pain qui atteint le haut niveau existent, elles sont très rares et reposent souvent sur un petit coup de chance.” De manière générale, et surtout compte tenu des évolutions récentes du marché, un prometteur cheval de sport en bonne santé et qui connaît son métier coûte un certain prix. Comme le souligne Arnaud Evain, “le prix d’un cheval de six ans bien éduqué, soigné, entraîné et formé, avoisinera les 30 000 euros.”



L’essayer, c’est l’adopter? 

Bien définir les critères de choix d’un cheval est une chose, mais il ne faut pas pour autant négliger l’essai. Un cheval peut être parfait sur le papier, correspondre en tout point aux critères prédéfinis, et pourtant ne pas du tout convenir au cavalier une fois en selle. Tout d’abord, pour être sûr de son choix, il est capital d’essayer plusieurs montures, plusieurs fois, quitte à revenir sur le premier essai en cas de coup de cœur. Il faut prendre ce temps précieux et ne pas se dépêcher en se laissant emporter par son enthousiasme. “Il faut essayer le cheval plusieurs fois, au moins deux, et sur différents terrains”, conseille Arnaud Évain. Un autre conseil, et non des moindres: il faut veiller à vérifier, par des mises en situation, qu’il monte – et descend! – bien dans un van ou camion, et qu’il reste sage à l’attache, même tout seul. Ce sont de petits détails, mais un cheval qui embarque mal et panique peut devenir une vraie source de stress et de danger.

À ne pas oublier…  

Aussi, faire procéder à une visite vétérinaire en bonne et due forme n’est pas une option. “Il vous en coûtera environ 500 euros, mais compte tenu du prix du cheval, le jeu en vaut la chandelle”, confirme Arnaud Évain. “En effet, cela vous garantira une bonne santé, ou vous empêchera de commettre une erreur en achetant un cheval malade ou irrégulier. Cela évitera autant que possible des problèmes postérieurs de vices cachés et/ou rédhibitoires. En plus de l’examen de base, le vétérinaire procédera à des radios des membres, observera le cheval se déplacer sur du sol mou et du sol dur, effectuera le test du surfaix, l’écoutera respirer, et en cas de doute, effectuera une endoscopie… Rares sont les comptes-rendus parfaits, mais le verdict est capital. Si le vétérinaire prononce un risque 1, c’est le mieux ; 2, cela peut convenir ; 3 ou 4, abstenez-vous. Attention toutefois, la visite vétérinaire offre une photo de santé à un moment donné, et ne constitue en aucun cas une garantie dans le temps. On ne peut pas, et on ne doit pas, essayer de faire dire au vétérinaire ce qu’il ne peut pas.” Adeline Wirth-Nègre livre un avis légèrement différent sur la question. “Jusqu’à sept ans, un cheval doit présenter une visite parfaite. S’il a déjà un peu d’âge et a déjà disputé des compétitions, on peut envisager de passer outre quelques petites imperfections observées sur les radios. C’est surtout l’examen clinique qui doit être irréprochable.” En la matière, le mieux est l’ennemi du bien, et le cheval parfait n’existe pas.

Enfin, lorsque le cheval convient, que la visite vétérinaire est satisfaisante, et qu’on confirme son intention de procéder à l’achat de l’équidé, il ne faut pas oublier de rédiger un contrat. “Cela peut tenir en trois lignes comme sur plusieurs pages!”, plaisante Arnaud Évain. “C’est du cas par cas. L’idéal est quand même de stipuler l’essentiel sur la facture.” De fait, encore faut-il rappeler qu’aucun achat ne doit se faire sans une facture établie en bonne et due forme, mentionnant la TVA, même si le particulier n’en a pas l’obligation. “Doivent figurer une ou deux phrases du type: « Acheté à usage de… pour le prix de… ». On peut aussi préciser la carrière antérieure du cheval, son état de santé et d’éventuels antécédents. Plus on en dit et se montre transparent, plus on protège les deux parties. Mieux vaut aussi stipuler d’éventuelles conditions de retour dans certaines circonstances, en précisant que le cheval aura bien entendu perdu un pourcentage donné de sa valeur.” Plus on se montre clair en amont, plus la suite sera limpide…

Cet article est paru dans le magazine GRANDPRIX n°119 actuellement en kiosque