Neuf organisateurs publient une lettre ouverte au sujet des dotations en CCI

“En tant qu’organisateurs de concours complets internationaux, nous souhaitons faire part de notre réflexion relative au rôle de l’organisateur dans l’écosystème des compétitions.” Alors que la problématique des dotations en concours complets internationaux est réapparue cet été à l’occasion du Grand Complet du Pin, neuf des plus importants organisateurs de CCI ont pris la plume ce matin pour s’adresser à toute la communauté équestre. Non sans considérer les attentes des cavaliers, Guillaume Blanc, Yannick Le Goupil (Le Pin), Yves Despres (Châteaubriant), Matthieu Grasset (Bazoges-en-Pareds),  Emmanuel Lagarde (Lignières), Didier Loison (Saulieu), Rafaël Mazoyer (Le Pouget), Julien Pelletier, Emmanuel Feltesse (haras de Jardy et Saint-Quentin-en-Yvelines), Pascal Sayous (Pau) et Marie-Claude Varin-Missine (Saumur) ont tenu à rappeler la complexité du cadre dans lequel ils exercent cette difficile activité.



Un modèle qui ne satisfait plus les différents acteurs du concours complet

“Il s’avère que le système actuel ne répond pas suffisamment aux attentes des compétiteurs qui n’arrivent pas à rémunérer leur travail par les dotations, ni des organisateurs dont le modèle économique est très fragile du fait de l’inflation de demandes légitimes telles que la qualité des sols, les services de sécurité renforcés, les besoins nouveaux en communication et information, auxquels s’ajoutent la règlementation plus exigeante et les prélèvements FEI. Les discussions en cours avec la FFE et les cavaliers ont été amorcées sur la problématique de trop faibles dotations. S’il est à préciser que le français gagnant du CCI 4*-S n’a pas gagné uniquement 750 euros, mais 3750 euros puisque cette épreuve était jumelée avec le Grand National, nous aimerions dépasser ce débat car il ne répond qu’insuffisamment aux questions sur l’avenir de la discipline. Les trois acteurs que nous sommes (FFE, cavaliers, organisateurs) partageons une passion commune pour la discipline. Nous avons la chance en France de proposer une offre diversifiée avec des dotations au-dessus des moyennes européennes et un circuit Grand National favorable aux cavaliers et à la sélection des chevaux et ce dans d’excellentes conditions techniques.

Néanmoins, ce modèle souffre notamment :

– Pour les cavaliers :
o D’un circuit pas assez rémunérateur et d’un manque de consensus pour la répartition
des dotations,
o D’un manque de reconnaissance des premiers sponsors que sont les propriétaires de
 leurs chevaux par les organisateurs,

– Pour les organisateurs :
o Des contraintes d’organisation de plus en plus importantes,
o Des financements qui se tarissent (moins de sponsors dans une période de crise amplifiée par la pandémie, une baisse des financements publics),
o De la difficulté à connaître les attentes des cavaliers. Pour exemple, la finale de l’ERM (CCI4-S) à Lignières en octobre 2019 avec une dotation de 57.000 euros dont 18.000 euros au premier n’avait réuni que dix-sept cavaliers,
o De la nécessité de bâtir un calendrier national qui laisse une place à chacun en évitant les concurrences de dates qui étouffent certains organisateurs,
o Et finalement d’une image erronée : celle que les organisateurs fassent des bénéfices sur le dos des cavaliers.”



Des organisateurs qui peinent à maintenir leurs compétitions

“Quels que soient les modes de fonctionnement de chacun (associatif à but non lucratif, évènementiel, public), nous pouvons affirmer et prouver la difficulté ne serait-ce que d’atteindre l’équilibre financier.

Les raisons découlent des contraintes légitimes liées à la discipline :
– Le rendu du sol en adéquation avec le bien-être et la conservation des chevaux. En fonction de la météo, il est nécessaire d’investir dans des moyens humains et matériels: la location d’engins adaptés, l’arrosage des pistes, le rebouchage manuel des trous des terrains …
– La demande croissante en équipement sportif de qualité mais également d’accueil tels que douche et sanitaire, électricité pour les camions, sol en dur des boxes démontables…
– La qualité de la construction du cross, non limitée aux obstacles de cross, pour assurer une valeur sportive en adéquation avec chaque niveau d’épreuves,
– La sécurité et la santé tant pour les cavaliers que pour les chevaux. Pour la préservation de la discipline nous devons être exemplaire dans ce domaine. Cela nécessite la présence d’équipes médicales avec médecins urgentistes en nombre suffisant, vétérinaires, maréchaux-ferrants, ambulances humaines et équines.
– La gestion d’un pool important de ressources humaines. L’organisation d’un concours complet requiert entre cent et deux cent cinquante bénévoles selon les modèles, indispensables au bon déroulement des trois tests. Les bénévoles sont nourris, parfois logés et une attention dédiée doit leur être accordée. Sans eux, il n’y aurait pas de concours.
– Évoluant aujourd’hui dans un monde d’images, la médiatisation de notre sport est indispensable. Cependant, la production d’images sur un cross est extrêmement plus coûteuse qu’en bord de carrière et sa diffusion très gourmande financièrement
– Enfin, la sécurisation du site pour répondre aux exigences préfectorales devient un nouvel enjeu de nos organisations : pour les cavaliers, chevaux, le public et les bénévoles.

C’est pourquoi avant d’envisager une dotation des plus lucratives, l’organisation se focalise sur la qualité de la prestation. En cela, le coût de l’organisation d’un concours complet n’a au final absolument rien de comparable avec toute autre discipline des sports équestres.”

Ce texte est paru ce matin sur France Complet



Proposition d’un modèle alternatif

“Nous estimons que l’organisateur met à disposition un plateau technique sécurisé afin que les cavaliers puissent valoriser leur travail, acquérir de la notoriété, des qualifications, des sélections, vendre leurs chevaux et leur image. Les concours français participent pleinement à la réussite et au rayonnement des couples lors des plus grosses échéances. Ils méritent d’être reconnus aussi pour cela. Il est nécessaire que le trio (organisateurs, cavaliers, FFE) s’appuie sur le professionnalisme de l’ensemble des acteurs pour mettre aussi en avant propriétaires, bénévoles et sponsors. Convaincus du potentiel médiatique de la discipline, nous pensons que le concours complet a une place à occuper auprès du grand public car il est vecteur de belles histoires.

Nous disposons d’atouts majeurs très en phase avec les aspirations de la société :
– égalité homme-femme,
– activité de pleine nature en phase avec la nature de l’animal,
– sport travaillant sur la relation à l’autre,
– cheval porteur d’image et de rêve.

Notre discipline est unique et le défi se doit d’être relevé : sport intergénérationnel et mixte avec un animal, qui de plus, s’inscrit dans des environnements naturels. Combien de disciplines olympiques peuvent avancer des critères équivalents ? Nous sommes solidaires des cavaliers, et nous sommes persuadés que c’est avec eux et avec notre fédération que nous trouverons ensemble les bonnes réponses.”