“Honnêtement, le commerce n’a jamais aussi bien marché”, Guillaume Batillat

Avec Baby Love, qui vit à quinze ans sa dernière saison de compétition, Guillaume Batillat a fini deuxième d'un Grand Prix 2* à Valence dimanche dernier. Le cavalier de trente-cinq ans, qui dispose de ses propres écuries à Neufmoutiers-en-Brie, en Seine-et-Marne, a posé ses valises avec sept de ses montures en Espagne, où il débute la saison sous le soleil. Alors qu’il sera encore présent trois semaines sur la côte méditerranéenne, le trentenaire a évoqué sa reprise des compétitions, son performant fils de Lupicor, son ancienne monture Denitha ou encore son rapport à l’élevage, lui dont les parents sont à la tête de l’affixe “des Étisses”.



Vous venez de terminer deuxième d'un Grand Prix 2* à Valence avec Baby Love (KWPN, Lupicor x Corland). Quel est votre sentiment après cette performance et ce beau week-end avec lui, marqué également par une deuxième place lors de l’épreuve qualificative pour le Grand Prix vendredi 29 janvier

Baby Love est un chouette cheval qui a désormais quinze ans et toute l’expérience. Je ne le monte que dans de belles épreuves et il ne se loupe que très rarement. Je suis toujours satisfait d’une deuxième place, mais obtenir la première aurait été sympa aussi! (Rires) Il y avait une foulée de trop, cela arrive, c’est comme ça.

Pouvez-vous évoquer Baby Love, avec qui vous évoluez depuis 2018, et vos objectifs avec lui pour la suite de la saison?

Avant moi, Baby Love était monté par Ludovic Gaudin et avait déjà beaucoup gagné. Il est arrivé dans mes écuries il y a trois ans. C’est un cheval avec lequel il faut commencer tout doucement et prendre le temps de se mettre avec. Une fois qu’il est en confiance, il est capable de sauter de grosses épreuves. Il a plus de qualités que de défauts! C’est sa dernière année de compétition, nous allons donc concourir comme ici sur des CSI 2* voire 3*. Il va finir tranquillement. Nous allons l’engager dans des épreuves qu’il est capable de remporter.

Quel bilan tirez-vous de ce premier week-end de compétition à Valence, où vous avez emmené sept chevaux? 

Mes chevaux ont très bien sauté pour un premier week-end de concours. Cela a été un peu plus difficile avec l’une d’entre eux, mais elle a très peu d’expérience et je ne la monte que depuis un an. Tous ont obtenu des résultats donc c’est encourageant pour la suite. J’ai l’habitude de venir à Valence. C’est une chouette tournée, située juste à côté avec la ville. J’aime bien ce concours, qui est bien organisé, avec de bons sols et de l’espace. Les épreuves ne commencent pas trop tôt et ne finissent pas trop tard, ce qui nous laisse le temps de travailler les chevaux.



“Il est évident que les cavaliers évoluant en CSI 4* et 5* ont connu un peu plus de difficultés”

Sur quels chevaux pouvez-vous compter pour les plus belles épreuves cette saison? Avez-vous connu des départs ou des arrivées dans vos écuries récemment? 

Il y a Come On Di Gisors (SF, Tresor x Le Tot Semilly) qui est un très bon cheval et sur lequel je compte beaucoup. J’ai ensuite plusieurs chevaux de sept et huit ans, qui n’ont pas encore énormément d’expérience. Au fur et à mesure de l’année, ils commenceront à courir des Grands Prix 2*. J’ai une jument de sept ans qui sort du lot, Encore Toi du Linon (SF, Kannan x Désir du Château). Pour moi, elle sera capable de tout sauter, mais nous verrons dans deux ans comment elle aura évolué. Il y a toujours du mouvement dans les écuries. En ce moment, j’ai quatre clients chez moi et une dizaine de chevaux. Cela me suffit, je veux pouvoir travailler tranquillement ces chevaux-là à la maison.

Comment se dessine la suite de votre saison au milieu de toute cette incertitude? 

C’est assez compliqué, nous ne savons pas si les concours vont être maintenus, ni où, ni comment… Je vais déjà terminer la tournée à Valence, retourner chez moi pendant deux semaines puis refaire quelques compétitions avec les plus jeunes chevaux. Je verrai ensuite ce qui se dessinera.

Vous êtes installé à votre compte à Neufmoutier-en-Brie, en Seine-et-Marne. Quel impact la pandémie de Covid-19 a eu sur votre activité en 2020, et avez-vous des attentes particulières pour 2021?

Honnêtement, le commerce n’a jamais aussi bien marché et j’ai vendu énormément de chevaux à la sortie du premier confinement, comme beaucoup d'autres cavaliers. Les gains ont été divisés par deux avec l’absence de concours, mais pour nous, professionnels et gérants de notre propre écurie, je ne crois pas que nous ayons à nous plaindre de l’impact de la pandémie. Il nous est possible de pratiquer notre sport, il n’y a pas trop de restrictions, même si cela reste plus compliqué qu’avant. Je parle pour nous, cavaliers de niveau 2* et 3*. Il est évident que les cavaliers évoluant en CSI 4* et 5* ont connu un peu plus de difficultés. Concernant mes attentes pour la saison 2021, j’attends de voir comment mes chevaux vont évoluer.



“Je garde un bon souvenir de toutes les écuries par lesquelles je suis passée”

Denitha - ici lors du Grand Prix CSI 3* de Bruxelles - a concouru à l'international avec Guillaume Batillat en 2016 et 2017.

Denitha - ici lors du Grand Prix CSI 3* de Bruxelles - a concouru à l'international avec Guillaume Batillat en 2016 et 2017.

© Scoopdyga

Vous avez formé énormément de chevaux ces dernières années. Lequel vous a le plus marqué? 

Il y a eu notamment Denitha (KWPN, Vingino x Goodwill), qui était incroyable. Avec lui, en tant que jeune installé, j’ai évolué jusqu’à 1,60m. Je l’ai ensuite vendu et il a évolué jusqu’en CSI 5* (avec les cavaliers saoudiens des écuries Al Shira’aa, ndlr). L’histoire est belle. C’est un cheval qui m’a beaucoup donné et avec lequel j'ai énormément gagné (dont le Grand Prix CSI 2* de Royan avec Guillaume, ndlr).

Vous êtes également passé par plusieurs écuries réputées, comme celles de Christian Ahlmann ou Jos Lansink. Qu’est-ce que cela a apporté à votre carrière et était-ce un passage obligé? 

Je suis parti dix ans de chez moi pour pouvoir ensuite m’installer. Cela m’a permis de monter plus de chevaux que d’habitude, évoluer dans mon équitation, mais aussi améliorer mes compétences en matière de dressage des chevaux, qui me tenait à coeur. Cela m’a également apporté de la rigueur. J’ai pu développer un carnet d’adresses pour essayer ou vendre des chevaux, mais aussi parler plusieurs langues. C’était mon objectif. Ces expériences m’ont servi de tremplin pour la suite de ma carrière et ce sont dix années que je n’ai pas regrettées. Je garde un bon souvenir de toutes les écuries par lesquelles je suis passé.

Vos parents sont connus dans le monde de l’élevage avec l’affixe “des Étisses”. Quel est votre implication dans le milieu et souhaitez-vous plus tard reprendre l’élevage familial, ou développer votre propre affixe? 

Aujourd’hui, mon père est à la retraite donc ils ne produisent plus beaucoup de chevaux et font naître entre quatre et cinq poulains par an. Pour ceux qui commencent à avoir cinq et six ans, nous verrons comment ils auront évolué d'ici les deux prochaines saisons. Je forme les produits de l’élevage en compétition et j'aime beaucoup ça. Je ne participe pas tellement au circuit de la Société hippique française (SHF), mais plutôt à des épreuves Préparatoires, non loin de la maison. Cela m’évite de partir loin et d’être bloqué tout un lundi ou un mardi pour concourir.

Honnêtement, j’ai un peu du mal avec l’élevage. J’aime bien les gens qui en font car ils sont passionnés, et en tant que cavalier nous avons besoin de ces gens-là, mais je n’ai pas assez de patience pour le faire moi-même. Il y a des gens dont c'est le métier et qui le font vraiment bien, donc je ne vois pas pourquoi je me mettrais à le faire aussi! Être cavalier est déjà assez compliqué. Entre la gestion des écuries et du personnel, il y a déjà beaucoup de travail. Et puis, pour faire de l’élevage, il faut s’y connaître dans les origines, etc. Je préfère former un cheval à partir de quatre ans, plutôt que de le former de sa naissance à ses trois ans. Je ne suis pas assez doué pour cela.