La rhinopneumonie a déjà tué neuf chevaux et l’épizootie est encore loin d’être sous contrôle…

Le dernier bilan officiel de l’épizootie de rhinopneumonie équine de type HEV-1 fait état de neuf morts. Alors que nombre de chevaux rentrent actuellement de Doha, Vejer de la Frontera, Vilamoura et Gorla Minore, des vétérinaires estiment que la période d’incubation de la maladie peut s’étendre jusqu’à vingt et un jours. Les compétitions nationales et internationales pourront-elles alors reprendre dès le 29 mars?



Des signes d’espoir à Valence

La rhinopneumonie équine de type HEV-1 risque malheureusement de rester un sujet central de l’actualité équestre pendant plusieurs semaines encore. Vendredi soir, la Fédération équestre internationale (FEI) a été informée de la mort d’un nouveau cheval à la clinique vétérinaire de Valence, portant à neuf le nombre officiel de morts liées à l’épizootie. Au CES Valencia, complexe équestre théâtre du premier foyer, “l’équipe vétérinaire a signalé que l’état de santé des chevaux malades s’améliorait” et “le représentant des cavaliers a informé le directeur vétérinaire de la FEI que les fournitures continuaient à être livrées sur le site.”

Samedi, avec le soutien de la Fédération des associations européennes de vétérinaires équins (FEEVA), la FEI s’est officiellement adressée au secrétariat de la Santé, de l’hygiène animale et de la traçabilité, organe déconcentré du ministère espagnol de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation, pour lui proposer des protocoles améliorés visant à permettre aux chevaux qui le peuvent de quitter le site de Valence. “Le représentant des cavaliers a indiqué que la réunion d’information quotidienne de samedi avait attiré de nombreux participants. L’état de santé des chevaux reste stable avec des cas moins graves signalés. Bien qu’il s’agisse de signes positifs, l’équipe vétérinaire a souligné qu’il était important de savoir que la maladie n’était pas encore totalement maîtrisée”, prévient la FEI. Une équipe française a mis à disposition un laboratoire d’analyse des tests PCR sur place pour aider à la surveillance des chevaux malades, permettant une détection plus rapide du mouvement du virus entre les chevaux et d’établir s’il existe un modèle.

Des palefreniers supplémentaires ont été mis à la disposition des équipes nécessitant un soutien pour s’occuper de leurs chevaux, tandis que des chauffeurs de camion supplémentaires sont recherchés pour aider à transporter les chevaux pouvant l’être. En outre, une équipe française spécialisée dans les écuries internationales de quarantaine a formulé des recommandations au sujet des bonnes pratiques de biosécurité, y compris le lavage et la désinfection des camions et des équipements, pour empêcher la propagation du virus. Une nouvelle écurie est arrivée, permettant aux chevaux d’être divisés en petits groupes. “Des barns supplémentaires sont disponibles dans la région et peuvent être installés immédiatement si nécessaire”, ajoute la FEI. L’accès aux différentes zones a encore été renforcé par l’utilisation de bracelets afin d’empêcher les mouvements entre ces zones. Un plan approuvé par l’équipe vétérinaire a aussi été mis en place, indiquant où et comment détendre et faire travailler les chevaux en bonne santé.



Le défi du retour des chevaux d’Europe du Sud

Vendredi, le Sunshine Tour de Vejer de la Frontera a finalement dû s’arrêter après qu’un deuxième cheval mis à l’isolement a développé une fièvre limitée et de légers signes neurologiques caractéristiques de la maladie. La FEI a rappelé que les chevaux ne devaient pas quitter le site sans la documentation nécessaire des autorités espagnoles, ce qui n’aurait pas empêché certains camions de se précipiter vers la sortie dès jeudi soir. La FEI et les organisateurs andalous ont travaillé au déploiement de délégués vétérinaires supplémentaires sur place afin de veiller au maintien des mesures de biosécurité et au traitement des chevaux affectés dans les écuries isolées. La FEI, soutenue par la Fédération des associations européennes de vétérinaires équins (FEEVA) et l’Association des vétérinaires spécialistes en équidés, branche espagnole de FEEVA, a fourni une assistance à deux cavaliers et à leurs vétérinaires pour s’assurer que les deux chevaux présentant des signes neurologiques dans les écuries d’isolement de Vejer seraient admis dans les cliniques de traitement spécialisées.

Aujourd’hui encore, il reste des chevaux à Vejer, certaines écuries n’ayant pas encore trouvé de solution pour faire escale durant leur trajet de retour vers l’Europe du Nord et de l’Ouest. D’autres doivent rentrer de Vilamoura mais aussi de Gorla Minore, où les compétitions se sont finalement achevées hier soir alors qu’elles devaient se dérouler tout au long du mois de mars. Pour faciliter et sécuriser les flux, la Fédération française d’équitation (FFE) a mis en place des écuries de transit au Pôle européen du cheval, à Yvré-l’Évêque dans la Sarthe, et au Parc du cheval de Chazey-sur-Ain, dans l’Ain, pour les équidés de retour d’Espagne, du Portugal et d’Italie. En collaboration avec la FEI, la FFE a organisé une assistance vétérinaire vingt-quatre heures sur vingt-quatre à Yvré et s’emploie à fournir le même service à Chazey. En Espagne, des étapes sont également possibles à Burgos et Madrid, de même qu’à Aix-la-Chapelle, en Allemagne. Dans tous les cas, les places doivent être réservées le plus tôt possible, et elles pourraient manquer.

La Fédération équestre européenne (EEF), qui a fourni à ses membres les lignes directrices du Collège européen de médecine équine interne (ECEIM) pour traiter les chevaux de retour des foyers ainsi que le protocole de biosécurité de la Fédération équestre britannique, s’est adjoint les services de la Professeure Marianne Sloet, vétérinaire néerlandaise et experte en HEV. Dans une note publiée par le Club des cavaliers internationaux de saut d’obstacles (IJRC), celle-ci met en garde les cavaliers rentrant sans effectuer d’escale. “Voyager avec des chevaux potentiellement infectés est en principe fortement déconseillé, mais d’autres priorités semblent exister pour le moment. De plus, étant donné qu’il n’est pas possible ou très difficile de trouver des adresses de transit fiables, les périodes de repos obligatoire ne sont malheureusement souvent pas respectées. Cela signifie que les camions avec des chevaux potentiellement infectés arriveront dans certains pays après avoir voyagé beaucoup trop longtemps. Cela peut non seulement exacerber la possible infection au HEV-1, mais aussi favoriser l’apparition d’autres ‘maladies du voyage’. Pensez à la ‘fièvre du transport’, une pneumonie grave due au fait de devoir rester trop longtemps debout la tête en l’air, ce qui rend la trachée moins apte à se nettoyer, aux diarrhées sévères, dues à la ‘confusion’ des bactéries intestinales, aux sabots, mis à l’épreuve du fait de l’obligation de rester debout pendant une longue période, et enfin à la tension musculaire, due au manque de mouvement chez les chevaux s’exerçant normalement plusieurs fois par jour.”

Concernant les infrastructures vétérinaires espagnoles, il semble que les cliniques de Valence et Barcelone font de leur mieux pour traiter les chevaux malades qui leur sont confiés. La clinique universitaire de Cordoue se préparerait à accueillir des chevaux en provenance de Vejer et devant être soignés des symptômes neurologiques de la maladie.



La période sans compétition devra-t-elle être prolongée?

Concernant Doha, l’Autorité vétérinaire du Qatar a confirmé que les quatre chevaux mis à l’isolement dans les écuries d’Al Shaqab et ayant précédemment concouru à Valence, demeureraient confinés au moins jusqu’au 15 mars et ne rentreraient pas en Europe avec les autres chevaux ayant pris part aux épreuves ces deux dernières semaines. S’appuyant sur les conseils de Marianne Sloet, une autre note de l’IJRC recommande d’isoler pendant deux semaines les chevaux de retour du Qatar. Cette quarantaine peut s’effectuer chez les cavaliers concernés, mais aussi dans des écuries mises à disposition à cet effet à Aix-la-Chapelle et à Riesenbeck, chez Ludger Beerbaum.

Enfin, la FEI a reçu une notification officielle selon laquelle un deuxième cheval avait été testé positif à l’EHV-1 en Floride. Il manifestait de la fièvre mais ne présentait aucun signe neurologique. Le département de l’Agriculture de Floride a indiqué sur son site web que le premier cheval avait été hébergé dans l’écurie D du World Equestrian Center (WEC) d’Ocala pendant la semaine 7 et que le deuxième avait été reçu dans cette même écurie D la semaine suivante. Celui-ci a quitté le WEC le 25 février 2021. Les autorités ont aussi annoncé que soixante-sept autres chevaux avaient été exposés à une possible contamination.

En outre, l’experte néerlandaise indique que la période d’incubation peut aller jusqu’à vingt et un jours et que les premiers symptômes peuvent apparaître après seize jours. Aussi, on peut s’interroger sur la durée de la période sans compétition décrétée par la FEI, la FFE, la Société hippique française et nombre d’autres fédérations nationales. Les concours pourront-ils reprendre dès le 29 mars? À ce stade, selon des vétérinaires consultés, il serait encore un peu tôt pour répondre de manière fiable à cette question. Il faudra au moins une semaine encore pour commencer à évaluer l’efficacité des mesures prises lundi dernier. De plus, selon les pays, les déplacements de chevaux sont déconseillés mais pas interdits. Ainsi, trois cents couples de concours complet se sont entraînés ce week-end aux Pays-Bas, comme si de rien n’était… Par ailleurs, les courses hippiques se poursuivent, en France et ailleurs. Ainsi, tout dépendra du respect des mesures barrières dans les écuries, de la qualité des protocoles d’isolement de la part des personnels. Bref, de la responsabilité de chacun.