Vinca Major van Vlieringen, la petite star belge qui a fait souche en Normandie

Née au printemps 1998 en Belgique, où elle a été initiée au saut d’obstacles par Patrik Spits, Vinca Major van Vlieringen s’est surtout imposée en France, accompagnant l’ascension de Pauline Guignery jusqu’en Coupe du monde. Créditée d’un ISO 173 en 2009 et toujours en pleine forme aujourd’hui, la BWP poursuit une belle carrière à l’élevage, avec pas moins de dix-huit produits, parmi lesquels six sont indicés au-dessus de 130, dont Claudio Fizz (ISO 143) et Blood Diamant (ISO 141), deux prometteurs fils de Diamant de Semilly qui faisaient la fierté de leur naisseuse et maman de Pauline, Annie Fournier, disparue l’an passé.



Pauline et Vinca sur la superbe pelouse de Chantilly.

Pauline et Vinca sur la superbe pelouse de Chantilly.

© Sportfot

Notre galerie de portraits intitulée “Trésors de championnes” s’intéresse aujourd’hui à Vinca Major van Vlieringen. Pour rappel, GRANDPRIX s’est appuyé sur une sélection de juments nées après 1995, ayant obtenu d’excellents résultats sportifs, matérialisés par l’obtention d’un indice de performances supérieur à 160, et ayant engendré au moins deux produits eux-mêmes indicés à 140 et plus. C’est bien le cas de cette charmante petite baie toisant 1,58m, qui a permis à Pauline Guignery de vivre quelques-uns des plus beaux moments de sa carrière, tout en faisant souche au haras d’Autheuil, fondé par la mère de Pauline, Annie Fournier, qui nous a malheureusement quittés en avril dernier. Une double histoire de famille en quelque sorte.

Vinca Major van Vlieringen est née le 10 mai 1998 à Petit-Enghien, à trente-cinq kilomètres au sud-ouest de Bruxelles, chez Sofie Moerman, vétérinaire et identificatrice pour les stud-books BWP et Z. Inscrite au BWP, la baie est une fille de Dominard. Monté jusqu’en Grands Prix CSI-A par le Néerlandais Piet Raijmakers, avec des victoires à Kiel et Hanovre à la clé, cet étalon Oldenbourgeois au pedigree 100% Hanovrien, fils de Domino et d’une mère par Perfekt I est né chez l’incontournable Paul Schockemöhle. Approuvé par les stud-books Oldenbourgeois et BWP, il n’a toutefois pas rencontré un grand succès à l’élevage. Vinca est d’ailleurs son meilleur produit tandis que le deuxième, Tornado van de Noordheuvel (BWP, mère par Farao de Guldenboom), a concouru jusqu’en Grands Prix et Coupes des nations de niveau 3* sous la selle de l’Italienne Benedetta Ganassini. “J’avais été séduite par Dominard à l’occasion du CSI-W de Malines, où il avait gagné le Masters”, se souvient Sofie Moerman. “Il n’a pas été beaucoup utilisé parce que ses produits n’étaient généralement pas très beaux à regarder, ce qui n’était heureusement pas le cas de Vinca.”

La souche de Vinca est loin d’être la plus prestigieuse de Belgique, mais sa mère, Quenelle by Stephex (BWP, Lys de Darmen x Arpad des Six Censes), née chez Stefan Conter, a tout de même produit d’autres bons chevaux. Ainsi, sa sœur, Benfica van Vlieringen (sBs, Cento Lano), a concouru jusqu’à 1,50m avec Grégory Wathelet, alors que son frère, Jahoo Saltim (Z, Jouyeux Ardent), s’est classé jusqu’à 1,45m avec le Néo-Zélandais Grant Wilson, et Java van Vlieringen (ISO 144, Z, Jouyeux Ardent), autre sœur, a gagné nombre de Grands Prix à 1,40m sous la selle de Maxime Pérez. “J’ai acheté Quenelle dans le but de lancer un petit élevage, sans ambitions particulières de haut niveau, dans une fermette que j’avais louée pour cela”, raconte encore Sofie Moerman. “J’ai mis une annonce dans une gazette agricole, pour dire que je cherchais une jument. Stefan Conter l’a lue et m’a contactée directement pour m’inviter à venir voir les siennes. À l’époque, il n’était pas encore le grand industriel et marchand qu’il est devenu. Ses chevaux vivaient en troupeau dans un pré. Il faisait un peu d’élevage mais voulait se recentrer sur le commerce. Quenelle était très dominante, petite, charpentée et montrait beaucoup de puissance au galop. Elle a attiré mon attention et je l’ai achetée, ce que je n’ai jamais regretté vu la qualité de ses produits, notamment ses filles. En revanche, elle m’en a fait voir de toutes les couleurs, car elle n’hésitait pas à se cabrer ni à s’échapper, quitte à sauter des barrières, des haies ou même des voitures!”, sourit l’éleveuse, généreuse en anecdotes. Quelques heures avant de pouliner, Quenelle me réveillait toujours en tapant la porte de son box. Elle voulait marcher quelques heures dehors avant de mettre bas en plein air, même sous la pluie, et rarement de nuit.” Il semblerait que le croisement de cette lignée maternelle avec Lys de Darmen, un Selle Français qui contribua grandement à la rapide progression de l’élevage belge, puis avec Dominard, ait fait des merveilles.

Avant de traverser le Quiévrain, Vinca Major, achetée à quatre mois sur petite annonce par Patrik Spits, a donné à l’éleveur et cavalier belge Catalpa DH (Z, Cento Lano), laquelle a notamment engendré Veracruz DH (Z, Vertigo Saint-Benoît), jument exportée en Chine et qui a concouru à 1,50m avec son naisseur ainsi que José Thiry. Vinca a débuté sa formation à cinq ans, également sous la selle de Patrik Spits, enchaînant les sans-faute jusqu’au Mondial des Jeunes Chevaux de Lanaken, où elle s’est classée septième. Au printemps 2004, après deux petits tours de reprises, elle est acquise par Annie Fournier, et aussitôt confiée à Pauline Guignery, double médaillée de bronze des championnats d’Europe Juniors de Münchwilen, en 1999, avec CHIO (Han, Calypso II x Werther). Le couple débute en compétition quelques semaines plus tard à Port-Mort, dans l’Eure, où Olivia et Hervé Godignon accueillaient un excellent concours sur herbe dans leur bucolique haras situé en bord de Seine.

Quenelle By Stephex, la mère de Vinca, a donné d’autres bons produits à l’élevage van Vlieringen.

Quenelle By Stephex, la mère de Vinca, a donné d’autres bons produits à l’élevage van Vlieringen.

© Collection privée



Une superbe deuxième place à Caen, au coude-à-coude avec Hickstead!

Pauline forme sa nouvelle pépite dans de petites épreuves Préparatoires, avant de se lancer à 1,40m un an plus tard, avec une prometteuse deuxième place, puis en Grands Prix CSI 2*. “Nos débuts n’ont pas été si simples. Vinca avait son petit caractère: c’était elle qui décidait, pas nous!”, se souvient Pauline. “Une fois que nous avons réussi à accorder nos violons, les résultats sont vite arrivés.” Après une saison blanche en 2006, Pauline et Vinca, alors coachées par Bruno Broucqsault, reviennent plus fortes en 2007, terminant deuxièmes des Grands Prix CSI 3* de Maubeuge, CSI 2* du Touquet et Pro Élite de Canteleu, et remportant leurs premières grandes victoires dans les Grands Prix CSI 2* de Palaiseau et Dunkerque. La saison 2008 débute sous les mêmes auspices, avec des classements en Grands Prix CSI à Comporta, Neufchâtel-Hardelot, Maubeuge et Béthune, suivis d’une première Coupe des nations au CSIO 3* de Lisbonne. Toujours aussi régulière en Grands Prix, la paire signe sa plus belle performance en octobre 2008, en prenant la deuxième place du prestigieux et défunt CSI 3* de Caen, juste derrière… le Canadien Éric Lamaze et Hickstead, fraîchement sacrés champion olympiques. “Quand on n’est battu que par un tel couple, on peut considérer sa performance comme une victoire! C’est avec Vinca que j’ai obtenu mes meilleurs résultats et sauté mes plus belles épreuves. Elle avait un grand galop et beaucoup de force. Tant qu’elle se sentait bien physiquement, elle pouvait tout sauter, quelle que soit la hauteur, y compris les plus grosses combinaisons, malgré sa petite taille! En revanche, dès qu’elle ressentait la moindre infime douleur, elle me pouvait me lâcher en fin de parcours. C’est d’ailleurs ce qui nous était arrivé à Bordeaux dans le Grand Prix du dimanche.”

En effet, au mérite de leur régularité et de leur exploits caennais, Pauline et Vinca, encore deuxièmes et premières des Grands Prix Pro Élite de Pontivy et Vannes, sont sélectionnées pour le prestigieux CSI 5*-W de Bordeaux. Cette expérience en Coupe du monde se solde par un tour à quatre points le samedi soir, et donc une élimination le dimanche. Ensuite, la cavalière alterne les étapes du Grand National, s’imposant à Lure et finissant deuxième à Sainte-Mère-Église et Cluny, puis troisième à Cabourg et cinquième à Saint-Lô, et Grands Prix CSI 3*, se classant encore deuxième à Béthune, troisième à Royan et quatrième à Canteleu. Alors que sa saison s’achève dès la fin août en raison d’une blessure, Vinca Major obtient cette année-là un ISO 173. Associée à Bruno Broucqsault, Pauline remporte le Grand National. Après un timide retour à la compétition en 2010, la jument signe un second come-back couronné de succès en 2013, avec à la clé des deuxièmes places dans les Grands Prix Pro Élite de Fontainebleau et Cluny et CSI 2* de Barbaste. Une belle aventure qui s’arrête en août, même si l’on trouve encore trace de quelques parcours plus modestes en 2015 et 2016.

Pauline et Vinca en 2009 au Normandy Horse Show de Saint-Lô.

Pauline et Vinca en 2009 au Normandy Horse Show de Saint-Lô.

© Sportfot



Une production régulière, dont les meilleurs éléments performent à 1,45m

Parallèlement à sa carrière sportive, la jument Flamande se reproduit par transferts d’embryons au haras d’Autheuil, à Autheuil-Authouillet, dans l’Eure. « Ma mère ne lui a jamais fait porter de poulain, de peur qu’il lui arrive quelque chose », rappelle Pauline. Dès 2007, naissent Tinka Lady (ISO 131, CS, Poor Boy) et Talulla (ISO 130, SF, Jus des Fontaines), classée jusqu’à 1,45m avec l’Italien Lorenzo Toscano. Après une pause de quatre ans, Vinca voit naître Blood Diamant (ISO 141, SF, Diamant de Semilly), formé par Aymeric Azzolino et François-Xavier Boudant, et avec lequel Pauline s’est classée dans deux Grands Prix CSI 2*, l’an passé à Royan. “Il me semble parti pour vivre une belle carrière. J’aurais bien aimé le conserver, mais j’ai dû le vendre dans le cadre de la succession de ma mère. Il a été acheté par Romain Bourdoncle et devrait reprendre les concours avec Axelle Lagoubie, à qui je souhaite tout le meilleur.”

En revanche, Pauline a pu conserver Claudio Fizz (ISO 143, SF, Diamant de Semilly), le meilleur produit de Vinca à ce jour, également formé par Aymeric Azzolino. Comme son propre frère, il reste sur une belle saison 2020, avec notamment un premier Grand Prix à 1,45m bouclé sans faute aux obstacles en novembre dernier à Saint-Lô. “Je pense que lui aussi sautera de belle épreuves”, estime sa cavalière. En 2012 sont également nés Comme Si Comme Sa (SF, Kalaska de Semilly), exportée à cinq ans en Belgique, où elle a débuté en Grands Prix CSI 1* avec Mélissa Rocher, Caipiroska (ISO 127, SF, Diamant de Semilly), initiée par Pauline et Aymeric, avant de faire le bonheur d’amateurs, et Ckilimanjaro (ISO 138, SF, Quincy), valorisé par Aymeric Azzolino et récemment vendu à l’amateure Laura Spillemaecker, “qui espère aller le plus loin possible avec lui”, précise Pauline, qui la coache. L’année suivante a été marquée par trois naissances : Djack Daniel (ISO 139, SF, Arko III), formé par Aymeric, François-Xavier Boudant et Pauline, puis vendu à l’amateure Marjorie Ferrando Covarel, Denia (SF, Le Tot de Semilly), rapidement exportée au Portugal, et Danieli (SF, Action Breaker), accidentée jeune.

En 2015 sont venus au monde deux produits OC de Tornesch: Forever Vinca et Fool’sGarden. La seconde été vendue poulinière à Guillaume Lemardeley, ancien groom de Vinca, installé dans le sud de la Manche. C’est d’ailleurs chez lui que la championne coule une paisible préretraite. “Il a passé de bons moments avec elle par le passé, alors il a été ravi de la retrouver, et il la gâte de carottes et de pommes! Elle est en excellente forme et vieillit très bien”, sourit la cavalière. Vinca Major compte cinq autres plus jeunes produits: Gangnam Style (SF, Tornesch), en formation chez Grégoire Hercelin, How Doyoudo (SF, Looping d’Elle), Ich Liebe Dich (SF, Qlassic Bois Margot, Jugurtha (SF, Conte Bellini), ainsi qu’un produit d’Emerald van’t Ruytershof, né en 2020 acquis par des propriétaires associés à Grégoire Hercelin, tandis qu’une porteuse devrait bientôt mettre au monde un produit de By Ceira d’Ick. 

“Nous tenterons peut-être un ou deux derniers transferts, pour le plaisir et si les chaleurs sont bonnes, mais ce n’est plus un objectif prioritaire. Vinca nous a déjà tant donné à maman et moi”, conclut la cavalière normande, qui loue désormais des écuries entre Gaillon et Vernon, dans l’Eure, où elle a presque toujours vécu. “Je me consacre en priorité au coaching et à mes chevaux de sport, mais j’ai tenu à continuer l’élevage avec Vinca et ses produits pour perpétuer l’œuvre de maman. Pour cela, j’ai conservé Jugurtha et Danieli, dont le premier poulain, Johnny Be Good (SF, Cornet’s Prinz), saute déjà très bien en liberté. Le but est de faire naître un ou deux poulains par an.” Ainsi, cette jeune et brillante souche n’a sans doute pas fini de prendre du galon.

(Article mis à jour le 16 mars 2021 à 13h20 avec le témoignage de Sofie Moerman)

Vinca coule une joyeuse préretraite chez Guillaume Lemardeley, son ancien soigneur.

Vinca coule une joyeuse préretraite chez Guillaume Lemardeley, son ancien soigneur.

© Collection privée



En 2008, Pauline Guignery et Vinca Major avaient signé un magnifique barrage pour terminer deuxième du Grand Prix CSI 3* de Caen.

Pauline Guignery et Blood Diamant restent sur un très beau parcours à un point, pour quatre centièmes de seconde (!) dans le Grand Prix du dernier CSI 2* de Royan, disputé le 1er mars.

Fin novembre dernier à Saint-Lô, Claudio Fizz a signé un excellent premier Grand Prix à 1,45m avec Pauline Guignery, ne concédant qu’un point de temps

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