L’équipe de France de dressage redouble de motivation et affiche ses ambitions pour Tokyo

À l’occasion d’une conférence de presse virtuelle organisée par la Fédération française d’équitation (FFE) hier avant le départ des dresseurs tricolores pour Tokyo, Morgan Barbançon Mestre, Maxime Collard, Isabelle Pinto et Alexandre Ayache ont affiché leur ambition olympique, entourés d’Emmanuelle Schramm-Rossi, directrice technique nationale adjointe en charge du dressage et Jan Bemelmans, entraîneur. Les montures des Bleus sont en grande forme, le moral au beau fixe et l’équipe semble soudée. Les quatre mousquetaires l’ont répété à plusieurs reprises, ils sont “à fond” et semblent avoir hâte d’en découdre, eux qui chercheront à se qualifier pour la finale par équipes dans dix jours. Pour intégrer le Spécial, la France devra faire partie des huit meilleures nations, et le nouveau format pourra, pour eux comme pour leurs concurrents, jouer en leur faveur… Ou leur défaveur.



Le compte à rebours est lancé pour l’équipe de France de dressage. Demain, jeudi 15 juillet, Morgan Barbançon Mestre, Maxime Collard, Isabelle Pinto, Alexandre Ayache et tout le staff tricolore partiront de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaule direction Tokyo pour la plus grande échéance sportive mondiale, les Jeux olympiques. Leurs montures, Sir Donnerhall II OLD, Cupido PB, La Gesse Hot Chocolat vd Kwaplas et Zo What s’envoleront le même jour depuis l’aéroport de Liège. À leurs côtés, un groom veillera à leur bien-être, tandis qu’un autre est déjà parti en compagnie d’un vétérinaire pour les accueillir sur le sol japonais. Un long voyage de plus de douze heures, avec une escale technique à Dubaï, attend ces athlètes extraordinaires. Un moyen de locomotion peu ordinaire mais indispensable pour concourir à l’autre bout de la planète et à plus de 9 700 kilomètres de Paris, qui n’inquiètent en rien leurs cavaliers. Et comme le rappelle Alexandre Ayache, qui vivra ses premiers JO en tant que titulaire après avoir été réserviste à Rio de Janeiro il y a cinq ans, “l’avion est moins physique pour les chevaux que le camion. Ils ne doivent pas se tenir dans les accélérations ou freinages, dans les tournants. J’étais inquiet avant Rio, mais on s’est rendu compte qu’ils étaient plus frais qu’après un voyage en camion.”

Avant cela, tous vivent depuis le 6 juillet dernier une quarantaine au sein du haras de la Forge, non loin de Deauville, dans le Calvados. Comme le détaille Emmanuelle Schramm-Rossi, directrice technique nationale (DTN) adjointe en charge du dressage, il s’agit d’un “regroupement technique qui répond à une obligation sanitaire”, tant pour les athlètes humains qu’équins, avant de pouvoir toucher le sol nippon. Tous sont d’ailleurs régulièrement soumis à des test PCR de dépistage anti-Covid. Un troisième sur place hier, un nouveau aujourd’hui, deux avant de venir en Normandie… Un nombre record en deux semaines mais un mal nécessaire. “La sécurité sanitaire passe avant tout, nous sommes prêts pour cela. Les organisateurs ont fait tous les efforts nécessaires pour que les Jeux soient maintenus. À nous de faire de même pour respecter les règles et les gestes barrières, afin que tout se déroule dans les meilleures conditions possibles”, relativise Morgan Barbançon Mestre, qui s’apprête à vivre sa deuxième échéance olympique.



Dernière ligne droite et tous les voyants au vert pour les Bleus

La France, contrairement à de nombreuses autres nations, a fait le choix de ne pas aller à Aix-la-Chapelle, en Allemagne, pour ces derniers jours de quarantaine, et ce en dressage, complet, jumping et para-dressage. “Les fédérations avaient la possibilité de choisir un lieu de quarantaine à condition que ce dernier soit validé, homologué et corresponde aux conditions sanitaires. Nous avons choisi de la faire de notre côté, après avoir choisi un site en collaboration avec les autorités sanitaires et vétérinaires”, explique Emmanuelle Schramm-Rossi. “D’un point de vue humain et sportif, nous nous félicitions de ce choix. Les conditions et le cadre sont idéals. C’est serein, nous choisissons nos horaires avec une certaine liberté, ce qui n’est probablement pas le cas à Aix-la-Chapelle, car beaucoup de monde y est présent. L’état d’esprit est vraiment favorable.”

Tous les voyants sont au vert concernant la préparation des Tricolores et sont actuellement dans un excellent état de forme. “Tous les chevaux et les cavaliers ont bien travaillé. Je suis convaincu que les chevaux sont dans la meilleure condition possible. Aujourd’hui (propos tenus hier en conférence de presse, ndlr) était le dernier entraînement en France, composé de stretching et dans un objectif de relâchement”, confirme l’entraîneur des Bleus, Jan Bemelmans. Occasion de peaufiner les derniers petits détails, ces ultimes répétitions dans l’Hexagone ont pour objectif de garder le moral des chevaux au beau fixe, ainsi que de la fraîcheur. “Nous aurons encore une grosse semaine d’entraînement là-bas, dans des conditions climatiques différentes, donc nous faisons le choix de sécuriser le bien-être de nos montures, et de leur faire prendre l’avion dans une forme excellente”, abonde le pilote de Zo What.  

Le moral de nos quatre mousquetaires et de leur entourage, semble lui aussi radieux, malgré un temps quelque peu maussade. “Nous avons une super équipe, soudée. Nous sommes à fond et allons tout donner”, commence Morgan Barbançon Mestre. “À une semaine de l’échéance la plus importante de la saison, si ce n’était pas le cas, il faudrait qu’on prenne un psychologue avec nous!”, rigole Alexandre Ayache. “Ce sera peut-être différent au retour, ce que je ne souhaite pas, mais nous avons hâte d’y être, de faire de notre mieux pour représenter notre pays, et rendre un maximum de gens de fiers. Le moral ne peut pas être meilleur, on part aux Jeux !”

 



L’ambition affichée de prendre part à la finale par équipes

L’ambition de l’équipe de France est clairement affichée. “Nous ferons le Spécial, personne n’a envie de laisser la place”, assène Emmanuelle Schramm-Rossi, qui souhaite à ces troupes de prendre part à la finale par équipes. Pour cela, il faudra donc faire partie des huit meilleures équipes au terme du Grand Prix, alors que le nouveau format olympique, avec trois cavaliers, ne laisse aucune place à l’erreur avec tous les scores pris en compte (voir visuel en fin d’article). Comme le confiait Isabelle Pinto, remplaçante, à GRANDPRIX il y a quelques jours, les Bleus en ont les capacités s’ils réitèrent leurs performances de cette saison. Morgan Barbançon Mestre évoque même la possibilité d’“aller chercher une sixième place”. Pour la meilleure Française au classement mondial, “ce serait un rêve d’entrer en finale individuelle” en compagnie de son fidèle miraculé, Sir Donnerhall II. Une éventualité qui serait “la cerise sur le gâteau” pour la DTN adjointe. “En entrant dans le Grand Prix Spécial, on aura fait le job”, estime Jan Bemelmans. “Il est possible que Morgan accède à la Libre. Dire que les deux autres couples aussi serait peut-être un peu exagéré, mais on ne sait jamais ! Ces jeux ont leurs règles.”

Quoi qu’il en soit, tous partent motivés et avec la volonté d’aller le plus loin possible dans la compétition. Des performances qui ne pourront pas être suivies sur places comme les années précédentes par tous leurs proches et amis, puisque le public étranger n’est pas autorisé pour ces Jeux clairement inédits, et qui se déroulent dans un contexte sanitaire tendu. “C’est particulier, notamment avec tous ces tests. Je pense que nous respirerons tous une fois négatifs et dans l’avion!”, débute Maxime Collard, qui découvrira l’ambiance des JO avec Cupido PB. “Nous nous étions préparés à ne pas avoir l’intégralité de nos proches, ce qui est atypique. Je serai relativement accompagnée, car la propriétaire (Céline Rozé, ndlr) de Cupi vient, que mon papa nous rejoint et que mon groom est mon conjoint. Je fais partie des chanceux, même s’il manque des éléments de mon noyau dur. Ce ne sera pas le cas de tout le monde. Mais cela reste un concours et la compétition passe avant tout. Nous avons un mental qui fait que de toute façon, nous arriverons à dépasser tout cela.”

Malgré tout, le positivisme domine donc, également du côté des autres membres de l’équipe. “Ne pas avoir les amis, les propriétaires, c’est vrai que c’est un peu dur. Nous avons eu la chance d’avoir été aux JO de Hong-Kong (où son époux, le Portugais Carlos Pinto, a concouru en 2018, ndlr), où beaucoup étaient venus. C’est un réel soutien. Nous pourrons cependant les appeler via WhatsApp, et nous les avons dans notre cœur. Il y a l’équipe, Emmanuelle, Jan, toute la fédération derrière nous, donc tout ira bien.” “Nous nous adapterons, et le sommes déjà car nous savions avant même d’être sélectionnés que ce ne seraient comme d’habitude. Je pense que personne ne souhaitait que ce soit comme ça, organisateurs comme athlètes, mais nous sommes motivés”, achève Alexandre Ayache, dont l’épouse Grete Püvi Ayache va bientôt donner naissance à leur deuxième enfant. 



Des Jeux olympiques sous contrainte

Une fois arrivée sur place, quel programme attend l’équipe de France jusqu’au 24 juillet, date de la première épreuve? Les athlètes n’auront pas le droit à une après-midi de tourisme, d’aller au restaurant ou de supporter des athlètes d’autres disciplines, car compte tenu des mesures sanitaires, ils pourront seulement se rendre du village olympique au site de compétition. “C’est un huis-clos, très fermé. Les organisateurs ne veulent prendre aucun risque et ils n’ont peut-être pas tort vu l’évolution de la situation. Cela permet le maintien des Jeux, et nous connaissions l’éventualité”, exprime Alexandre Ayache. Le Sudiste a d’ailleurs un programme tout tracé une fois arrivée au Japon ! “Nous allons faire comme ici et s’amuser ensemble. Il y a des professionnels du tarot!”, révèle-t-il avec bonne humeur. “Il faut aussi que je prenne des cours concernant Instagram avec Morgan, j’ai pas mal de devoirs et mon cahier de vacances! Je ne suis pas doué avec les réseaux sociaux, donc elle va pouvoir m’expliquer comment cela fonctionne.”

Concernant les chevaux, une fois qu’ils auront quitté l’aéroport, ils vivront au moins deux jours de calme, afin de s’adapter, avant de reprendre peu à peu le travail. “Nous aurons plus d’informations sur place sur les horaires auxquels nous disposerons de la piste. Avec les températures attendues, nos épreuves se dérouleront entre 17h et 22h, heures locales. J’imagine que nous pourrons nous caler là-dessus”, expose Emmanuelle Schramm-Rossi.

Les équidés devront justement s’acclimater à ce climat nippon. Eux qui supportent logiquement plutôt bien la chaleur, devront également faire face à un taux d’humidité élevé. Le choix de l’équipe a été de ne rien faire de particulier face à cela pour l’heure en France. “Actuellement, nous sommes bien en termes d’humidité, il nous manque la chaleur!”, s’exclame Alexandre Ayache, qui en profite pour jeter une petite pique bien sentie à la météo que connait actuellement une grande partie nord de la France. “Je viens du Sud, où nous vivons de vrais étés. D’ailleurs je ne sais pas comment vous faîtes ici pour expliquer aux enfants ce qu’est l’été…”, s’amuse-t-il. La monture du Niçois connait la chaleur, tout comme celle d’Isabelle Pinto, qui s’entraîne à Cabriès, non loin d’Aix-en-Provence. “Nous connaissons le choc climatique inverse”, appuie-t-elle. “J’ai même mis une couverture de cent-cinquante grammes la nuit à Hot Chocolat, qui n’a pas transpiré. Nos chevaux accuseront certainement le coup en arrivant au Japon, mais au moins, ils n’auront pas puisé dans leurs réserves d’énergie avant de partir.”

Et si le climat nippon peut sembler hostile, les organisateurs ont tout prévu, avec des horaires adaptés mais aussi des écuries climatisées et un manège tempéré. “L’atmosphère leur sera favorable une grande partie du temps. Tout est mis en place pour les préserver. Ce sera juste plus difficile sur les carrières et les épreuves”, indique Emmanuelle Schramm-Rossi.

“Les conditions de travail dans cette dernière ligne droite sont optimales, tout le monde est prêt. Il est certain qu’il y a des contraintes, un cadre difficile, mais la motivation est présente. Nous essayons de faire au mieux pour que les athlètes puissent se concentrer sur la performance avec les entraîneurs”, conclut avec ambition Sophie Dubourg, DTN.



Zoom sur le nouveau format olympique où rien n’est joué d’avance

Quinze équipes de trois cavaliers et soixante chevaux au total s’élanceront pour le Grand Prix le 24 et 25 juillet prochain. Les huit meilleures équipes seront qualifiées pour le Spécial, qui déterminera les médailles collectives le 27 juillet. Pour rappel, les trois scores compteront, il n’y aura pas le système de drop score (ou score le moins bon retiré). Les cavaliers présents en individuel prendront part au Grand Prix et se qualifieront directement pour la Reprise Libre en Musique du 28 juillet, sans passer par le Spécial s’ils ne concourent qu’en individuel. Cette finale individuelle, sera ouverte aux dix-huit meilleurs duos.  

“Vu le format de ces Jeux, tout est jouable. Avec trois scores qui comptent, le moindre souci peut faire plonger une équipe. Donc même dans les meilleures équipes, il peut y avoir des surprises”, résume Alexandre Ayache.

Retrouvez ci-dessous un résumé du nouveau règlement olympique proposée par la Fédération française d’équitation, expliquant également les conditions d’entrée du couple remplaçant. 

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