Julien Épaillard file en tête au bout d’un long suspense à Bourg-en-Bresse
Point d’orgue du CSI 4* de Bourg-en-Bresse, le Grand Prix dominical a donné lieu à un scénario certainement jamais vu, cet après-midi. Si une victoire indiscutable du numéro deux mondial Julien Épaillard sur Donatello d’Auge n’a rien d’inhabituel, voir vingt-cinq couples au départ de la deuxième manche d’une telle épreuve l’est davantage. Un couac dû à une erreur de programme sportif. Le Normand a fini par supplanter deux compatriotes: l’Ardennaise Alexandra Francart, deuxième avec Betty du Prieuré, et le local Benoît Cernin, troisième en selle sur Dynamite du Miral.
Pour la dix-huitième fois en trente-deux éditions, le drapeau français a été hissé cet après-midi au terme du Grand Prix CSI 4* de la ville de Bourg-en-Bresse, à Ainterexpo. Rendez-vous ô combien populaire dans la région, cet événement à l’entrée gratuite à rassemblé de très nombreux spectateurs dans les tribunes, en loges et sur le bord de piste. Un public qui a été parcouru par une certaine confusion devant le déroulé du point d’orgue du week-end. Pour cause, l’épreuve se courant en deux manches, les treize meilleurs couples de l’acte initial auraient dû être invités à se présenter une deuxième fois pour être départagés dans une seconde manche. À l’accoutumée, les éventuelles fautes puis le chronomètre permettent en effet de dresser un classement, et ainsi de définir quels couples sont invités à fouler une nouvelle fois la piste. Or, une erreur s’étant glissée dans le programme sportif, le temps de la première manche n’a pas été pris en compte, ce qui a mené à la tenue d’une seconde manche fleuve, incluant vingt-cinq partants, soit la moitié de la liste de départ! Parmi eux, les huit couples ayant signé une prestation parfaite sur le tour corsé du chef de piste Grégory Bodo, deux ayant écopé de temps dépassé, et quinze (!) paires ayant quitté la piste avec quatre points à l’issue du tour initial.
“C’est peut-être un peu déceptif, mais le sport a été au rendez-vous et le meilleur a fini par gagner. Malheureusement, nous avons commis une erreur sur le programme, c’est ainsi, nous avons dû l’assumer. Il faut garder à l’esprit que nous organisons un concours par an avec une équipe de bénévoles. Le programme a été relu par de nombreuses personnes. Initialement, nous voulions organiser un Grand Prix en deux manches avec la prise en compte du chronomètre de la première manche. Cela a peut-être été difficile pour les sportifs en ce qui concerne les dotations, mais le public bressan a été ravi, ils ont vécu un grand moment de sport”, a déclaré Jeanne Gonin-Ducousset, présidente de l’association Bourg sports équestres, qui organise l’événement.
À l’issue de la seconde manche, douze des vingt-cinq couples sont donc repartis bredouille, seuls les treize meilleurs s’étant partagé la dotation. La pilule sera sans doute particulièrement dure à avaler pour les cavaliers ayant réussi un remarquable sans-faute en première manche, ce qui les aurait quasiment assurés de repartir avec de l’argent en temps normal. Là, ils ont sombré dans le classement à la suite d’une deuxième manche manquée. Parmi eux figurent notamment Julien Gonin, époux de la directrice du concours, avec Valou du Lys, ou encore les Suisses Romain Duguet, sur le puissant Hunger Games du Champ du Bois, et Sasha Barthe, invitée surprise avec Brocéliande du Lac. Si elle n’est pas parvenue à entrer dans le temps imparti, l’ouvreuse Inès Joly avait elle aussi laissé toutes les barres sur les taquets en signant un premier parcours plaisant sur Pegasus Deau Remi. Piégée par deux fois dans l’acte deux, la jeune Stéphanoise a chuté au vingtième rang.
“Cela a joué en ma faveur, mais ce n’était pas très juste pour les chevaux”, Victor Bettendorf
Ce format exotique a permis à d’autres concurrents de saisir une opportunité d’intégrer les places d’honneur, à l’image du tenant du titre Victor Bettendorf. Sacré l’an passé avec Mr Tac des Fusains, le Luxembourgeois avait cette fois misé sur son très agile Simolo de la Roque. Piégé sur la sortie du difficile double de verticaux placé en numéro 12, le couple a tout de même pu boucler l’épreuve au cinquième rang grâce à un second tour empreint de fluidité. “Je n’avais pas grand-chose à perdre donc j’ai fait comme si j’avais réussi un sans-faute en première manche”, a analysé le Normand d’adoption. “Je trouve ce format pas très juste pour ceux qui ont signé un sans-faute en première manche. Cela a joué en ma faveur, mais ce n’était pas très juste pour les chevaux car la moitié d’entre eux ont sauté deux tours sans être classés. C’était une erreur, cela peut arriver!”, relativise-t-il. Pour son produit de l’élevage de la Roque, qui a déjà remporté trois Grands Prix CSI 3*, ce rendez-vous avait des airs de test d’étape. “S’il sautait bien aujourd’hui, j’avais en tête de l’engager dans des épreuves du Longines Global Champions Tour cette année. C’est le cas, donc j’espère qu’il pourra être le cheval de tête d’un deuxième piquet en 5*. Son comportement aujourd’hui présage de belles choses pour le futur”, projette Victor Bettendorf.
Également très rapide au second round après une faute dans le premier, le Lorrain Simon Delestre a lui aussi pu effectuer une bonne opération en se plaçant sixième avec son Dexter Fontenis, deuxième puis troisième de Grands Prix CSI 5* à Doha en début d’année. De même, l’Irlandais Mark McAuley s’est emparé de la septième place avec Jasco vd Bisschop. Le Suisse Niklaus Rutschi et Cardano n’ont quant à eux pas touché la moindre barre de l’épreuve, seul un point de temps dépassé les a écartés au podium. En 2019, l’Helvète était monté sur la plus haute marche grâce à Carassina.
Un podium bleu-blanc-rouge mené par le numéro deux mondial
Parmi les treize classés de ce Grand Prix, huit représentaient les couleurs de la France. Après une première faute, la locale Mégane Moissonnier, meilleure cavalière du concours, a réussi à se placer dixième avec Bracadabra, qui lui avait déjà offert la deuxième place du Grand Prix CSI 3* de Compiègne Classic la semaine passée. Elle devance le Nordiste Nicolas Delmotte et son chevronné Ilex VP, tandis que la jeune Jeanne Sadran est la dernière classée avec le surpuissant et capé Virtuose Champeix.
Parmi les huit couples ayant signé un premier sans-faute, seulement trois sont parvenus à réitérer, s’assurant ainsi d’un podium. Voisin de l’étape bressane, Benoît Cernin a lâché les chevaux avec la bien nommée Dynamite du Miral, une fille de Nabab de Rêve qui courait là son deuxième Grand Prix 4* après un essai manqué à Grimaud en fin d’année dernière. Double zéro en 37’’74, le cavalier de trente-quatre ans s’est donc placé troisième, comme l’an passé avec Deuxcatsix d’Eglefin, repassé depuis sous la selle de sa propriétaire Marie Pellegrin. Après un premier parcours au style toujours impeccable, Alexandra Francart a livré une seconde manche très convaincante avec Betty du Prieuré, bouclant un sans-faute en 35’’74. L’Ardennaise, qui a dit au revoir à quelques-unes de ses meilleures montures ces dernières années, n’avait pas été à pareille fête depuis longtemps et sa grise de douze ans signe ici sa meilleure performance.
Pour sa véritable rentrée après une dix-huitième place dans sa première finale de la Coupe du monde Longines, Donatello d’Auge a aujourd’hui offert à Julien Épaillard un solide double sans-faute, suffisamment rapide pour l’emporter. Plus véloce encore que son ombre, le Normand a abaissé le chronomètre de référence à 34’’28, ce qui l’a rendu une nouvelle fois irrattrapable. Pour autant, le numéro deux mondial explique avoir adapté sa tactique au format particulier en ajoutant une foulée pour aborder l’ultime obstacle de la seconde manche. Une “sagesse” qui ne l’empêche pas d’inscrire son nom pour la première fois au palmarès de cette épreuve, quatorze ans après sa huitième place sur Latina du Pitray.