“Tous les chevaux revenus d’Espagne peuvent être considérés comme suspects”, selon le RESPE

La cellule de crise du Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (RESPE) s’est réunie pour la deuxième fois hier dans le cadre des foyers d’herpèsvirose de type 1 (HVE1, rhinopneumonie) confirmés en Espagne à Valence, sur le site du Valencia Spring Jumping Tour et dans plusieurs départements en France en lien épidémiologique avec ce foyer espagnol. Cette réunion a permis d’effectuer un nouveau bilan d’étape et d’adapter les recommandations à l’évolution de la situation.



Hier s’est de nouveau réunie la cellule de crise du RESPE, regroupant l’Association vétérinaire équine française, la Fédération des acteurs du développement des techniques modernes de reproduction équine, la Fédération des éleveurs du Galop, la Fédération française d’équitation (FFE), la Fédération nationale du cheval, France Galop, l’Institut français du cheval et de l’équitation, Labéo Frank Duncombe, la Société française des équidés de travail (SFET), la Société hippique française (SHF), Le Trot, la direction générale de l’Alimentation (DGAL) et le RESPE.Cette réunion a permis d’effectuer un nouveau bilan de la situation en Espagne et en France, et d’adapter les recommandations à l’évolution de la situation épidémiologique. 

En Espagne, à Valence, le Pr Anne Couroucé (Oniris/RESPE), missionnée par la FFE, a pu constater “un manque certain d’organisation et de gestion de la situation sanitaire. Les chevaux ont présenté majoritairement deux à six jours d’hyperthermie, suivis par deux jours de retour d’amélioration, puis par l’apparition d’éventuels signes neurologiques pouvant être modérés (queue flasque et rétention urinaire) ou beaucoup plus aigus avec ataxie sévère. De nombreux chevaux n’ont pas présenté de signes neurologiques, mais quand des signes cliniques ont été observés, ils étaient neurologiques”, précise le communiqué publié ce soir par le RESPE. À ce jour, onze chevaux sont morts à Valence. Certains chevaux toussaient. “Cela pourrait être une complication pulmonaire de la rhinopneumonie mais pourrait également être lié aux conditions dégradées d’hébergement sous la tente.”

“Dans ce contexte, la décision a été rapidement prise de venir en soutien aux cavaliers français et d’œuvrer pour leur rapatriement en France dans les meilleures conditions. Un protocole a été rédigé par la FFE avec le support scientifique du Pr Anne Couroucé et le Dr Jérôme Thévenot (vétérinaire de l’équipe de France de saut d’obstacles, ndlr) pour ce faire et transmis par la DGAL aux autorités espagnoles. À ce stade, le protocole est en validation finale. Les chevaux français devraient pouvoir regagner le territoire rapidement et poursuivre leur quarantaine sur le site du Parc équestre fédéral (à Lamotte-Beuvron, ndlr).”

“Si toutes les compétitions ont bien été suspendues par les autorités espagnoles, il est à noter que des cas positifs ont aussi été enregistrés depuis la dernière réunion, sur les sites des CSI de Vejer de la Frontera (Sunshine Tour, le premier contrôle positif n’a été officialisé qu’aujourd’hui, ndlr) et d’Oliva (Mediterranean Equestrian Tour, information dont GRANDPRIX ne disposait pas jusqu’à présent, ndlr). Tous les cavaliers présents sur ces sites ont été invités à rejoindre leur pays d’origine, ce que la majorité a fait à l’arrêt des compétitions, et sans aucune mesure sanitaire particulière, contrairement à ce qui a été mis en place pour Valence”, ajoute le RESPE dans son communiqué.

En France, on dénombre une quinzaine de foyers confirmés dans des écuries de chevaux revenus de Valence, dans le Calvados, l’Hérault, l’Indre-et-Loire, la Manche, la Mayenne et le Rhône, ainsi qu’en Charente-Maritime, Dordogne, Gironde, Haute-Savoie et Seine-et-Marne. “D’autres sont en cours d’investigation dans d’autres départements”, précise le RESPE. “Les équidés présentent majoritairement des symptômes respiratoires, ou uniquement de l’hyperthermie. Quelques animaux ont développé des signes neurologiques, mais aucun mort n’a été signalé pour l’heure sur le territoire dans cette population. À ce jour, les foyers dont le RESPE a connaissance ont mis en place des mesures sanitaires strictes, mais l’information n’est pas connue pour l’ensemble des structures accueillant des équidés revenant d’Espagne, d’autant moins pour les autres sites que celui de Valence, mais on peut considérer que tous les effectifs qui en sont revenus sont suspects.”

“Par ailleurs, exception faite des chevaux en lien épidémiologique direct avec le foyer de Valence, le nombre de cas d’herpèsvirose de type 1 reste, pour l’instant, dans les valeurs habituellement observées à cette époque de l’année, soit cinq foyers depuis début 2021. Pour les deux derniers foyers déclarés fin de semaine dernière en Ille-et-Vilaine et en Mayenne, des différences génétiques sur les souches identifiées confirment l’absence de lien avec le foyer de Valence”, soulignent les scientifiques. Au-delà de la France, de nouveaux cas de HVE1 en lien avec Valence ont également été confirmés en Belgique, en Allemagne, en Suisse, en Italie, en Suède et au Qatar.



L’ensemble des rassemblements équins sous surveillance

Si l’ensemble des compétitions équestres nationales et internationales et autres rassemblements sous l’égide de la FFE et la SHF sont suspendus depuis le 1er mars et jusqu’au dimanche 28 mars 2021 inclus, ces mesures ne s’appliquent pas à l’ensemble des activités équines. Il n’y aura pas de concours organisés par la SFET jusqu’au 28 mars, beaucoup ayant été reportés après cette date, mais les courses de trot et de galop sont maintenues à ce stade, “cette population d’équidés étant bien distincte de celle des chevaux de sport et aucun lien n’ayant été identifié avec l’Espagne. Des mesures strictes ont également été prises pour éviter tout contact avec des chevaux de sport sur le territoire national. Les chevaux de course sont, de plus, tous vaccinés, ce qui est obligatoire depuis 2018”, commente le RESPE.

En outre, la saison de monte se poursuit. “Des mesures de précaution doivent cependant être appliquées, notamment pour les centres de reproduction accueillant des chevaux de sport. Pour ceux-ci, la cellule de crise conseille vivement de suspendre leur accueil jusqu’à début avril. À ce stade, la cellule de crise incite au report des foires, ventes et autres rassemblements commerciaux de chevaux, en particulier si des chevaux de sport sont concernés. Si ces derniers doivent être maintenus, la cellule de crise invite les organisateurs et les participants au respect le plus strict des mesures de prévention et à la mise en place d’un protocole sanitaire des plus rigoureux. La cellule de crise maintient que les mesures sanitaires de prévention (mises à jour aujourd’hui, ndlr) restent d’actualité et doivent s’appliquer à l’ensemble de la filière, plus particulièrement aux rassemblements équestres ne relevant pas de la FFE et la SHF: les warm-up et autres rassemblements de cavaliers, y compris les randonnées et chasses à courre, sont un point d’extrême vigilance. La cellule de crise recommande de les suspendre jusqu’à nouvel ordre.”



Dépistage et vaccination

Pour les tests de dépistage, la cellule de crise rappelle qu’il convient d’utiliser des tests ayant fait l’objet d’une validation rigoureuse (sensibilité terrain, spécificité et détectabilité) et de façon appropriée dans l’évolution de la maladie chez un équidé atteint. “En effet, pour les chevaux vaccinés, la quantité de virus retrouvés au ‘bout du nez’ est moindre, en particulier en début et en fin d’apparition des symptômes. Ce constat est d’autant plus vrai en cas de forme neurologique pour laquelle les charges virales détectées sont fréquemment très faibles.”

“La vaccination contre les herpèsvirus reste limitée dans la filière équine et n’est pas obligatoire dans les sports équestres. Même si des chevaux correctement vaccinés ont pu montrer des signes cliniques, notamment neurologiques, la vaccination reste une mesure efficace de lutte collective contre la maladie. Pour l’animal vacciné, elle permet d’en limiter les symptômes, principalement pour les formes respiratoires et abortives, et surtout la quantité de virus excrétés. Pour l’ensemble de la population équine, la vaccination limite donc la diffusion de la maladie et sa circulation au sein des groupes”, dit encore le RESPE.

Dans le contexte actuel européen et mondial, la cellule de crise met en garde sur un risque de tension sur la disponibilité des vaccins herpétiques et appelle à des mesures de vaccination raisonnées, rappelant les recommandations émises la semaine passée, et reprises hier dans un autre article de GRANDPRIX concernant spécifiquement la vaccination.