“J’aimerais pouvoir prendre part à deux ou trois belles Coupes des nations dans l’année”, Romain Duguet

Depuis quelques mois, le Suisse Romain Duguet a posé ses valises en Normandie, au haras de La Chesnaye, avec sa compagne Maëlle Martin, après deux années passées en bordure de la forêt de Rambouillet au Haras de Bory. Avec quatre chevaux principaux, le Français d’origine a débuté la saison sur les chapeaux roue, d’abord à Royan, puis à Villers-Vicomte et enfin au Mans où il remporte deux épreuves du CSI 2* avec Alldream Delacense et Bel Canto de Boguin. L’occasion pour l’helvète de s’entraîner pour retrouver le chemin du très haut niveau.



Samedi, vous avez remporté au Mans l’épreuve majeure du jour aux rênes de Bel Canto de Boguin (SF, Grenat de Grez x Arpège Pierreville), deux ans après votre dernière victoire ensemble. Comment analysez-vous votre performance ? 

Je suis très content car Ben Canto est en super forme. Il est très régulier à ce niveau d’épreuve et l’année dernière il m’a offert de nombreux classements à 1,50m. Samedi, nous sommes passés en numéro trois et j’ai déroulé mon parcours comme je l’avais imaginé. Sur cinquante-huit partants, il y a eu seulement cinq sans-faute, ce qui montre bien le niveau de technicité de l’épreuve avec un double et un triple qui ont fait beaucoup de dégâts. Au regard de ces différents éléments je suis d’autant plus satisfait de la manière dont le cheval a sauté. 

La saison 2022 a débuté par une série de tournées dont Royan, Villers-Vicomte et Le Mans. Quel est votre avis concernant ce début d’année??  

Je suis ravi d’avoir gagné au Mans car je savais que je pouvais compter sur des chevaux compétitifs et en pleine forme. À Royan, Bel Canto et moi sortons avec un point de pénalité dans le Grand Prix (2*, le 17 février, ndlr). J’ai également écopé d’un point dans le Grand Prix (2*, le 27 mars, ndlr) de Villers-Vicomte avec Calder (Holst, Casall Ask x Coriano). Hunger Games du Champ du Bois (SbS, Elvis Ter Putte x Mytens), un cheval de neuf ans qui saute très bien, a quant à lui conclu ses premières épreuves comptant pour le classement mondial sans faute, ce qui reflète un un bon début de saison. J’ai quatre chevaux performants, il suffit maintenant que les choses se concrétisent. 

Comment se hiérarchise votre piquet de chevaux?

Il y a Calder, âgé de treize ans, qui a déjà affronté de très gros parcours. Il revient peu à peu à la compétition après deux ans de blessure. Il a recommencé dans des épreuves Grands Prix en mai (d’abord dans le CSI 2* de Nancy sous la selle de Maëlle Martin, ndlr). Il a l’air très en forme, ce que j’espère être de bon augure pour la suite. Je peux aussi compter sur Bel Canto, performant sur des épreuves à 1,50m et qui entame sa troisième saison avec moi. J’ai également Alldream Delacense, un hongre de douze ans performant sur 1,40-1,45m et Hunger Games, un très bon cheval en lequel je fonde beaucoup d’espoir car il a de gros moyens. Ce sont mes quatre chevaux de tête. Il y a ensuite Carthage du Lozon (SF, Mylord Carthago x Quick Star), âgé dix ans, qui a commencé à courir des épreuves à 1,40m en fin d’année dernière, Cancio Zimequest (SF, Quick Star x Diamant de Semilly), un étalon de neuf ans et Cartol Royal Ps (OS, Catapult 7 x Stakkatol), un cheval à valoriser pour performer à plus haut niveau. J’ai aussi des jeunes de cinq et six ans. 

Quelles sont vos ambitions pour la suite de la saison? 

Pour ma première partie de saison, je dirais être performant à Bourg-en-Bresse (avec un CSI 4* du 18 au 22 mai, ndlr) et Saint-Gall (en CSIO 5*, du 3 au 6 juin, ndlr). Mon objectif jusque début juin est très clairement le Grand Prix de Saint-Gall, en espérant y obtenir un bon résultat. J’aimerais aussi pouvoir prendre part à deux ou trois belles Coupes des nations dans l’année.  



“Le mental est essentiel pour accéder au très haut niveau”

Vous êtes installé depuis quelques mois au haras de la Chesnaye, dans la région deauvillaise. Qu’est-ce qui a motivé votre décision? 

Grégoire Oberson, le propriétaire du haras de la Chesnaye, nous a fait une proposition pour s’installer chez lui, ce que ma compagne Maëlle Martin et moi avons accepté. Le cadre est vraiment exceptionnel et la région bien dotée en concours, ce qui est fantastique pour former les chevaux. La proximité de la plage est un réel plus, surtout pour les chevaux d’âge car cela est un outil de travail formidable. Sans oublier la qualité de vie pour nous!

Quelle place accordez-vous à la formation des jeunes chevaux? Quelles sont selon vous les qualités essentielles que doit présenter un cheval pour franchir les portes du très haut niveau? 

Pour moi, la formation des jeunes chevaux est centrale car c’est là que tout commence. En formant des jeunes chevaux, il est possible de détecter leur potentiel. C’est aussi à ce moment que nous leur apprenons les bases et, normalement, quand cela est bien fait, il n’y a pas de mauvaise surprise dans la suite de leur cursus vers huit ou neuf ans. C’est vraiment très important pour moi.

L’énergie, le respect et le mental sont pour moi les qualités essentielles d’un cheval de très haut niveau. Ce dernier point est réellement ce qu’il y a de plus important. Quand un cheval a envie de se battre pour réaliser un sans-faute et qu’il donne tout à son cavalier, alors on peut dire qu’il a un véritable mental de compétiteur. 

Comment décririez-vous votre système ? 

Mon système est assez classique. Je suis entouré de quatre ou cinq personnes, des propriétaires ou des gens qui achètent des chevaux avec moi. Il y a par exemple mes clients suisses, la famille Fasel, qui m’a suivie après mon départ de Suisse. Nous achetons soit des chevaux pour le sport soit pour le commerce et faire tourner la boutique. 

Quelles sont vos ambitions à long terme ?  

J’aimerais être présent aux Jeux olympiques de Paris. Aujourd’hui, je dois vendre des chevaux pour assurer la stabilité financière de mon entreprise, et pour participer à une telle échéance, il faut déjà avoir le cheval et surtout pouvoir le garder. C’est toujours le même problème!

Allez-vous suivre la finale de la Coupe du monde Longines dès jeudi ?  

Dès jeudi je ne sais pas car j’ai beaucoup de choses à faire (rires). Je ne passerai pas trois jours devant ma télévision, mais comme j’aime beaucoup le sport, je la suivrai avec attention.

En 2017, vous aviez terminé cette même finale à la deuxième place avec Twentytwo des Biches (SF, Mylord Carthago x Kalor du Bocage), qui s'est gravement blessée il y a quelques jours dans le Grand Prix du Saut Hermès mais qui a heureusement pu être opérée avec succès. Avez-vous eu de ses nouvelles ?  
Twentytwo est une de mes juments de cœur, elle a marqué ma carrière, alors j’ai évidemment pris de ses nouvelles et elles sont plutôt rassurantes. Elle a été opérée avec succès et peut déjà faire quelques pas par jour ce qui est bon signe. Nous espérons que d’ici deux mois, une fois que tout sera bien stabilisé, elle pourra retourner en Suisse au parc, sûrement pour pouliner. 

Ci-dessous, Romain Duguet avec Bel Canto de Boguin dans le Grand Prix 2* du Mans le 3 avril.