Bordeaux consacre Marlon le funambule et Edgar l’équilibriste
Marlon Módolo Zanotelli et VDL Edgar M ont remporté de haute lutte le Grand Prix Coupe du monde Longines de Bordeaux, ce soir en Gironde. Au terme d’un barrage à dix-sept, le Brésilien et son hongre de quatorze ans ont devancé sur le fil le Suisse Édouard Schmitz, deuxième avec Quno, comme dimanche dernier à Amsterdam, et l’incontournable meilleur couple du monde, formé le Suédois Henrik von Eckermann et le crack King Edward, troisième. Meilleure Française, Pénélope Leprevost s’est classée neuvième avec Bingo del Tondou.
Toujours classés, toujours à la remise des prix, toujours salués pour la qualité de ce qu’ils montrent en piste, toujours admirés par les amateurs de belle équitation, fine et dans le mouvement en avant, Marlon Módolo Zanotelli et VDL Edgar M sont toujours là… mais rarement victorieux. On se rappelle leur première victoire en Grand Prix CSI 5*, le 29 août 2020 à Grimaud, dans le cadre de l’Hubside Jumping, qui fut aussi la première du cavalier dans une telle épreuve. Depuis, le champion des Jeux panaméricains de Lima, en 2019 avec Sirène de la Motte, en avait gagné un autre, l’an passé au Longines Paris Eiffel Jumping, en selle sur Like a Diamond van het Schaeck, ainsi que le Trophée de Genève, largement au niveau des plus modestes étapes de la Coupe du monde Longines, en décembre dernier avec Edgar, mais il n’en demeure pas moins l’un des pilotes les plus discrets du top dix mondial. Ni bad boy, ni adepte de la petite phrase qui fait mouche, ni démesurément expansif, le Brésilien est un homme simple, un père de famille bien dans ses pompes. Et un cavalier méritant qui fait honneur au sport et à l’art équestre. Que demander de plus?
Pour s’imposer, le trentenaire originaire de Fortaleza, dans l’enchanteur Nordeste brésilen, a dû venir à bout d’un barrage à dix-sept. Oui, dix-sept… soit un de plus que le nombre de cavaliers qui ont marqué des points au classement de la ligue d’Europe occidentale de la Coupe du monde Longines et cinq de plus que le nombre de paires qui se sont partagé les 215.000 euros mis en jeu. Si cet état de fait résulte d’abord de la qualité du plateau, composé de plus de vingt-cinq paires capables de gagner ce Grand Prix, la responsabilité incombe forcément un peu au chef de piste, Jean-François Morand, aussi discret et talentueux à son poste que Marlon Zanotelli au sien. Qu’a-t-il manqué? Un ou deux verticaux plus hauts, un ou deux oxers encore plus larges? À vrai dire, on retiendra surtout que le temps imparti, trop large, n’a pas pu jouer son rôle de semeur de doute. “Je l’ai mesuré au plus juste, comme toujours, et l’ai raboté de quelques secondes par rapport à la norme réglementaire de 350 mètres par minute, mais cela n’a pas suffi. Je pense que le début du parcours a dû installer les concurrents dans un galop trop confortable, si bien qu’ils sont plutôt allés à 370m/min”, analyse avec sincérité celui qui officie aussi au CSI 5* de Dinard. Pour autant, il faut franchement saluer le dessin original de son tour, qui a gêné bien des cavaliers parmi les moins aguerris en Coupe du monde.
Daniel Deusser lance les hostilités
Et l’on ne peut qu’applaudir le tracé du parcours réduit, qui a nourri le suspense et l’intérêt technique de cette finale au chronomètre, qui a absolument ravi sept mille spectateurs enchantés du retour de ce concours historique, populaire et prestigieux. Le scénario fut dur pour l’ouvreur, Grégory Cottard, qui a pris des risques et renversé les verticaux 17 et 13b, quatrième et dernier obstacles, associé à sa brillante Bibici, terminant dix-septième. Daniel Deusser a appuyé sur l’accélérateur avec Scuderia 1918 Tobago et pris une option gagnante entre l’oxer 11 et le dernier, passant devant le vertical 12. Gagnante, mais pas pour l’Allemand, finalement sixième. Moins rapide sans prendre l’option, l’Irlandais Denis Lynch a fini septième avec le valeureux Brooklyn Heights, tandis que le Belge Pieter Devos a pris l’option mais manqué de fluidité avec MOM’s Toupie de la Roque, huitième.
Simon Delestre et Cayman Jolly Jumper font forte impression
Quand est venu son tour, Simon Delestre a embrasé le Parc des expositions avec Cayman Jolly Jumper, un véritable chat, comparable à un véhicule à quatre roues à la fois motrices et directionnelles. L’harmonie demeure une quête pour le Lorrain et le fils d’Hickstead, battus sur le vertical 10a du triple réduit en double, et finalement onzièmes, mais quelle impression et quel chrono, qui leur aurait offert la deuxième place! On pourrait presque en dire autant du Britannique Scott Brash et de Hello Jefferson (ex-Jerenmias van het Hulstenhof), authentique balle rebondissante. Après avoir pris la tête, ils ont finalement terminé cinquièmes. Deuxièmes dimanche dernier à Amsterdam, Édouard Schmitz et Quno sont entrés en piste avec la ferme intention de réussir quelque chose de grand, ce qu’ils ont fait, abaissant d’une seconde et demie le temps de référence, non sans effleurer les deux éléments du double. Ils auraient pu faire encore mieux - et gagner? - s’ils n’avaient pas coupé la ligne de départ quelques dixièmes après avoir épuisé son temps réglementaire dédié à la prise de galop. Finalement deuxième, le Suisse pourra se satisfaire d’avoir validé sa qualification pour la finale d’Omaha.
Pénélope Leprevost et Bingo del Tondou en démonstration
L’Allemand Gerrit Nieberg et l’Autrichien Max Kühner ont tous deux fauté sur le vertical 17 placé face à la porte, finissant quatorze et quinzième avec Blues d’Aveline et Elektric Blue P. Double sans-faute sans histoire pour le Néerlandais Jur Vrieling et Long John Silver 3, dixièmes. On attendait le Suédois Henrik von Eckermann et King Edward, champions des champions et numéros uns en tout, mais il faut croire qu’il est des barrages qui leur siéent moins que d’autres. Particulièrement bondissant, le petit alezan n’a pas effleuré une barre, mais le tracé était peut-être trop technique pour la paire, qui s’est contentée de la troisième place. Double sans-faute impeccable pour Pénélope Leprevost et Bingo del Tondou, comme à Lyon et Bâle, et belle neuvième place pour un duo qui imprime un peu plus sa marque à chacune de ses prestations. Faute sur le 17 aussi pour Olivier Perreau et GL events Dorai d’Aiguilly, méritant douzièmes.
Un “S” à enseigner dans les écoles d’équitation
Excellente première en Grand Prix CSI 5* pour le Britannique Harry Charles et Balou du Reventon, l’ancien partenaire de l’Irlandais Darragh Kenny et de l’Américain Brian Moggre, brillants quatrièmes presque sans forcer. Quelle classe! Faute sur le 10a pour l’Espagnol Eduardo Álvarez Aznar et Bentley de Sury, treizièmes. Et, on l’aura compris, les seize concurrents précédemment cités ont dû s’incliner devant le héros le plus inspiré de la soirée, Marlon Zanotelli, qui a réussi un “S” à enseigner dans les écoles d’équitation entre le vertical 2 et le mur de palanques 16 aux couleurs de l’opéra de Bordeaux, qui avait ému tant de chevaux au tour initial, avant de laisser VDL Edgar M avaler à grandes foulées toutes les distances et obstacles qui séparaient ce très beau couple d’une victoire dont on se souviendra. Parabens!, comme on dit au Brésil.
Au classement général provisoire de la ligue d’Europe occidentale Longines, Henrik a repris les commandes à Julien Épaillard, avec désormais 102 points. Édouard Schmitz a donc validé son ticket pour Omaha, tout comme Denis Lynch et Marlon Zanotelli. Scott Brash s’est replacé dans la course, mais il lui faudra aller finir le travail dans trois semaines à Göteborg. Idem pour le Danois Andreas Schou, les Allemands Richard Vogel et Hans-Dieter Dreher, le Brésilien Yuri Mansour, l’Italien Emanuele Gaudiano, s’il rentre du Moyen-Orient, le Suisse Pius Schwizer et le Néerlandais Harrie Smolders. Pour les autres, ce sera un exploit en Suède ou rien. Côté français, Julien Épaillard et Kevin Staut seront de la partie, mais pas Simon Delestre et Pénélope Leprevost, qui se concentreront bientôt sur la saison extérieure, avec les Jeux olympiques de Paris 2024 en ligne de mire.
Les résultats
Le parcours
Le classement général provisoire de la ligue d’Europe occidentale Longines
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