Les bons gestes à adopter pour protéger les chevaux des épidémies hivernales

Face aux récents cas de grippe et de rhinopneumonie équine déclarés depuis quelques jours en Europe, le Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (RESPE) appelle à la vigilance. Camille Vercken, fondatrice de l’entreprise Equiways, spécialisée dans la biosécurité des écuries et lieux où peuvent transiter et/ou se rassembler des chevaux, prodigue quelques conseils à destination des détenteurs d’équidés… pour éviter de revivre une épizootie telle que celle de HVE-1 qui avait frappé la filière équine en 2021.



“La cellule de crise n’est pas déclenchée. Ce matin, nous avons reçu un appel à la vigilance qui doit nous engager à garder un coup d’avance sur les virus hivernaux, dont la grippe et l’herpèsvirose de type 1 (HVE-1)”, clarifie d’entrée de jeu Camille Vercken. En début de journée, dans un message préventif, le Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (RESPE) a demandé aux acteurs du monde équestre de rester vigilants face à la circulation du virus de la grippe équine dans le nord de l’Europe et aux quelques cas de HVE-1, mieux connu en France sous le nom de rhinopneumonie équine, recensés en Belgique et en Allemagne. Pour protéger les chevaux et limiter au maximum la propagation de ces virus, il convient d’adopter de bons réflexes, particulièrement en cette période marquée par un intense brassage d’équidés, de larges rassemblements dans le sud de l’Europe et un grand nombre de concours indoor dans le nord du continent. La fondatrice d’Equiways, société spécialisée dans la biosécurité des écuries et lieux où peuvent transiter et/ou se rassembler des chevaux, livre ses conseils: vigilance, désinfection, analyse des vecteurs de transmission, quarantaine et isolement.  
“Le premier conseil que je peux prodiguer consiste à vérifier que l’on dispose bien d’un désinfectant virucide ou, mieux encore, d’un désinfectant virucide, fongicide et bactéricide qui permettra de limiter le risque de transmission à travers les vecteurs”, débute la spécialiste. En effet, la grippe et le HVE-1 sont des maladies virales, dont le principal vecteur n’est autre que l’humain et tout ce qu’il utilise pour soigner les chevaux. “En périodes de risque virologique, nous devenons les pires ennemis de nos chevaux puisque nous véhiculons ces virus. Dès lors, il est primordial de déterminer le matériel très utilisé, potentiel vecteur, comme les balais, pelles, brouettes, etc., et les désinfecter régulièrement.”    
D’une manière générale, le virus de la grippe résiste assez mal aux atmosphères aérées, contrairement à celui de la rhinopneumonie, plus coriace. Son principal moyen de transmission reste la voie aérosol, c’est-à-dire via des gouttelettes émises par un cheval toussant, par exemple. Pour autant, les risques de contagion par vecteurs ne sont pas neutres. Quant au HVE-1, il se propage également dans l’air ou par transmission directe, mais il montre une résistance bien supérieure sur les vecteurs potentiels. Il a notamment été démontré que ce virus pouvait rester actif pendant cinq jours ou plus. “L’équipe dirigée par Stéphane Pronost (directeur adjoint du service de recherche de Labéo, spécialisé en virologie et biologie moléculaire, ndlr) a même démontré que ce virus pouvait persister dans l’eau à température ambiante jusqu’à quinze jours. Il est donc très résistant. C’est pourquoi il est indispensable d’identifier tous les objets de la vie quotidienne d’une écurie pouvant le propager, et bien cibler la désinfection, sans oublier tout ce qui touche au transport du cheval. Le Dr Anne Couroucé (professeure en médecine interne équine, présidente de la commission vétérinaire de la Fédération française d’équitation et membre de la commission vétérinaire de la Fédération équestre internationale, ndlr) nous rappelle souvent de prêter attention à tous les nids bactériens, à commencer par nos écharpes et bonnets. J’ajouterais à cette liste nos téléphones portables ou encore les volants de nos voitures”, ajoute Camille Vercken.



Quarantaine et isolement

En cas de circulation virale élevée, deux mesures, la quarantaine et l’isolement, doivent être distingués et correctement appliquées. “La quarantaine consiste à maintenir à l’écart durant une période donnée un ou plusieurs chevaux revenant d’un rassemblement ou arrivant de l’extérieur, avant leur introduction ou réintroduction dans un cheptel. Ce principe a une réelle résonnance notamment en cas de déplacements. Pour plein de raisons, les propriétaires ne peuvent pas toujours mettre en place une réelle quarantaine, mais de petits gestes comme la prise de température, la surveillance et la mise à l’écart des autres équidés valent déjà mieux que l’inaction”, plaide la fondatrice d’Equiways. “Quant à l’isolement, il s’agit d’une mesure visant à écarter d’un cheptel un cheval malade ou suspicieux. Il est fondamental de l’isoler dès les premiers symptômes, car ce geste permet de prémunir d’une contagion massive. Dans le cas de la rhinopneumonie, c’est d’autant plus difficile que les premiers symptômes ne sont pas toujours perceptibles et que l’état de santé du cheval contaminé peut se dégrader en très peu de temps. L’isolement est une grande clé, de même que le fait de s’occuper des chevaux malades ou à risque en derniers.” 
Comme l’ont souvent rappelé des vétérinaires praticiens de haut rang, dont Christophe Schlotterer et Jérôme Thévenot, la vaccination est d’une grande aide, notamment pour limiter les risques de survenue des symptômes neurologiques mortels de l’herpèsvirose équine de type 1, sujet sur lequel GRANDPRIX s’était penché à plusieurs reprises lors de la très grave épizootie de 2021 (lire ici et ici). Alors que le RESPE a fait état ce matin d’un “contexte de circulation virale et de tension sur les approvisionnements de vaccins”, les préconisations émises par Camille Vercken doivent être appliquées avec la plus grande précaution. Et, selon la spécialiste, elles devraient l’être de façon permanente. “Nous ne sommes pas dans une situation alarmante, mais les maladies pointent le bout de leur nez alors que les compétitions reprennent. Ces conseils de bonne conduite quotidienne ne s’appliquent pas qu’aux situations d’alerte. Nous devons simplement faire un peu plus attention. La vigilance de chacun aidera à freiner la propagation des virus.”
Enfin, en cas de suspicion, le meilleur remède reste d’appeler un vétérinaire. Les symptômes principaux sont les écoulements nasaux clairs à jaunâtres, la toux, les baisses d’appétit, la fatigue ou l’ataxie pour la forme neurologique du HVE-1, et de la fièvre, des écoulements nasaux translucides, de la toux et de la fatigue pour la grippe équine.