“Je ressens une profonde fierté à désormais représenter la France”, Laurence Vanommeslaghe

Laurence Vanommeslaghe, originaire de Bruxelles, s’est fréquemment démarquée sous couleurs belges en CDI, mais vient d’opérer un changement important. Après avoir pris part aux championnats du monde de 2014 à Caen, puis disputé les championnats d’Europe de 2015 à Aix-la-Chapelle, et concouru outre-Atlantique, à Wellington, en CDI 4* et 5*, ainsi que lors du circuit de la Coupe du monde, la cavalière de cinquante-et-un ans vient de changer de drapeau pour désormais représenter l’Hexagone sur la scène internationale. Actuellement dans le Top 100 mondial, la partenaire d’Edison explique cette décision et détaille ses ambitions.



Depuis quelques jours, vous avez pris la nationalité française, que vous défendrez désormais sur la scène internationale, après avoir été représentante belge pendant toute votre carrière. Pourquoi ce changement ? 

J’ai demandé la nationalité française car voilà vingt-neuf ans que j’habite en France, où je suis implantée depuis mes vingt ans, puisque j’y ai effectué la totalité de mes études et n’en suis jamais repartie. En réalité, ma vie est dans l’Hexagone, même si je rentre épisodiquement en Belgique pour rendre visite à mes parents. Avec le temps, mes liens avec mon pays de naissance se sont fortement distendus. Aujourd’hui, je me sens plus Française que Belge ! J’ai pris conscience qu’il devenait compliqué de vivre dans le pays des Lumières, d’y mener mes activités, et de monter sous bannière belge, en prenant en compte tous les problèmes pratiques sous-jacents. Plus sentimentalement, je ressens une profonde fierté à représenter la France, qui est mon pays d’élection, puisque je l’ai choisi de longue date. De plus, mon intégration à la communauté des cavaliers belges était de moins en moins effective à mon sens et il était difficile de constituer un réel esprit d’équipe dans ce climat lors d’échéances importantes. J’ai donc simplement pris conscience qu’il s’agissait pour moi de mettre un peu de cohérence dans ma vie. La France est le pays que j’ai choisi, certes, et concrètement, je fréquente les terrains de concours français depuis vingt ans. J’éprouve une réelle joie, cette étape étant franchie, à me dire que je pourrais tout à fait légalement participer, par exemple, aux championnats de France, où j’avais l’habitude de me rendre pour disputer le Grand prix et le Grand prix Spécial, mais sans pouvoir jusque-là rentrer dans le classement tricolore. J’ai obtenu symboliquement la nationalité française au moment de mon anniversaire, en avril, et je considère cette coïncidence presque comme une seconde naissance. Il me faut encore patienter quelques jours pour pouvoir participer à des Coupes des nations en tant que coéquipière : jusqu’au mois de juillet. Il m’a fallu attendre deux années complètes sans prendre part à ce type d’épreuve selon le règlement de la Fédération équestre internationale (FEI), mais j’arrive aujourd’hui au terme de ce délai, qui m’a obligée à nombre de renoncements.  Mais cela est terminé !

La Fédération française d’équitation (FFE) m’a très bien accueillie, mais en plus, elle m’a énormément aidée dans mon parcours vers la citoyenneté française, notamment grâce au suivi attentif de Laurent Gallice. En effet, la fédération a fait son maximum, pour accélérer la période d’instruction du dossier. 

De quels chevaux disposez-vous à ce jour ?

Aujourd’hui, je suis en recherche de nouveaux chevaux de sept à huit ans présentant un fort potentiel, et dont j’aimerais affiner le travail jusqu’au Grand Tour. Mon cheval de tête, Edison (KWPN, Johnson TN X Balzflug) est toujours mon partenaire, et va commencer sa saison européenne après notre séjour en Floride. Havalon (HAN, Blue Hors Hotline x Wolkentanz II) prend un peu d’âge, puisqu’il a seize ans cette année, et s’oriente vers sa fin de carrière, mais je tiens à continuer à présenter avec lui des Grands Prix appliqués comme il sait me le permettre. Je dispose aussi d’une très bonne recrue, un KWPN de huit ans, par Bordeaux et Crack C. Il commence à décliner le répertoire du Grand Prix, et j’aimerais commencer à l’engager en fin de saison, soit au Médium Tour, soit directement sur le Grand Prix. 



“J’adorerais bien sûr participer à la réunion olympique”

Comment se résume votre parcours de cavalière ? 

 Je ne suis pas issue d’une famille équitante, mais d’un milieu où les études constituaient une réelle religion. J’ai malgré tout commencé à pratiquer à neuf ans, dans un poney-club local de ma ville de Bruxelles, en me montrant très sérieuse d’emblée. Mes parents étant totalement extérieurs au système équestre, je n’ai pas participé aux épreuves Juniors et Jeunes Cavaliers. Je suivais donc mon cursus scolaire et montais vraiment dans une optique de loisir. Dans le cadre de mes études, commencées en Belgique, puis devenues très prenantes en France, j’ai dû interrompre l’équitation. Après une maîtrise d’histoire de la philosophie en Sorbonne, j’ai intégré l’Institut d’Études Politiques de Paris, pour enchaîner sur un D.E.A (diplôme d’études approfondies, l’ancêtre du Master 2, ndlr) et terminer sur un doctorat en Sciences Politiques. Je suis revenue à ma passion pour l’équitation à vingt-sept ans en reprenant au niveau amateur, et j’ai gravi toutes les catégories d’épreuves méthodiquement : de la C, à la B, au Petit Tour. Grâce à l’acquisition d’un vieux maître d’école de Pierre Subileau, Carlos, j’ai pu intégrer les mouvements du Grand Prix, puis j’ai acquis mon premier cheval de ce niveau, Avec Plaisir (Han, A Jungle Prince X Hitchcock). Avec lui, j’ai vécu une très belle histoire. En effet, j’ai très rapidement été promue en équipe nationale belge alors que j’étais cavalière amateure. J’ai remporté le titre national et ai pu concourir aux Mondiaux de Caen, en 2014 (conclus au quarante-sixième rang individuel, ndlr). L’année suivante, j’ai pris part à l’échéance européenne, à Aix la Chapelle (avec une trente-troisième place au classement final, ndlr) et j’ai alors décidé de me consacrer à ma pratique équestre. Je gère aujourd’hui mon écurie du Mesnil-Saint-Denis, ouverte aux propriétaires, et propose un quotidien de cheval de haut niveau idéal à mes pensionnaires, à trente minutes de Paris. Avec Plaisir m’a donc lancée dans le monde du Grand Prix et m’a aussi permis d’avoir le privilège de travailler avec des entraîneurs de pointe. L’entraîneur national était à l’époque Sjef Janssen, et j’ai aussi été entraînée par Anky van Grunsven (son épouse, triple médaillée d’or olympique, ndlr) et Jürgen Koschel. Ce cheval m’a fait vivre une expérience exceptionnelle en tant que cavalière amateure, statut auquel je tiens et que je revendique toujours aujourd’hui. Ma vie est totalement dédiée aux chevaux, et j’en commence une nouvelle étape, sous couleurs françaises !

Quels sont actuellement vos objectifs ?

 Je suis réaliste, mon cheval de tête ayant cette année quatorze ans, je ne pense pas à l’échéance parisienne (les Jeux olympiques de 2024, ndlr) à ce jour. Lorsque vous ne disposez que d’une seule monture, il faut en effet bénéficier d’un concours de circonstances pour pouvoir participer à ce type d’événement, qui n’a lieu que tous les quatre ans. Être au sommet au bon moment se révèle vraiment compliqué, je m’interdis donc de rêver à ce genre d’échéance. Cela dit, j’adorerais bien sûr participer à la réunion olympique, a fortiori à Paris, la capitale de mon pays de cœur. Avec un seul cheval, j’ai conscience d’être dans une situation assez aléatoire. Pour 2023, mon objectif est de stabiliser des moyennes élevées en Grands Prix, de prendre part à de beaux concours internationaux, et pourquoi pas, d’être sélectionnée aux championnats d’Europe si je suis compétitive.